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Critique de vibrelivre


En sauvage compagnie, Manuel Rivas, roman, 1994, traduction de Dominique Jaccottet

Je ne sais pas si ce livre est véritablement un roman. L'auteur parle de légende contemporaine. Moi, je suis bien en peine de le définir, En sauvage compagnie tient du conte, en tout cas, c'est un récit narré par un corbeau-poète au roi de Galice, corbeau qui est une réincarnation d'un habitant d'Aran, village proche de la Corogne. le roi de Galice qui est le dernier , vole, corbeau blanc, avec ses trois cents guerriers -troubadours. Il veille sur le village et ses habitants d'aujourd'hui. Ils volent Contre le vent.
le récit mêle passé et présent, morts et vivants, dureté et tendresse, langage parlé et poésie, réalité et rêve, la mer et la ville, Aran et le monde. Les morts se sont réincarnés en animaux, et parlent, pensent, et ressentent. Et comparent: Pas une seule bête ne serait prête à se couvrir de cochonneries pour une paire d'oeufs. Nous oui. C'est en cela que nous sommes humains, philosopha Don Xil. Il s'agit d'oeufs de huppe dont le nid est goudronné d'excréments. le paysage vit aussi: Et l'esprit de l'automne rôdait dans les chemins, cabriolait sur les sentiers, courait en criant dans les défilés, secouait à pleins bras les pommiers, frappait aux portes, sifflait sous les vantaux, et agitait les bannières du séchoir ...
le personnage principal vivant est Rosa, épouse et mère, qui vit avec un mari brutal et alcoolique, et incapable de lui dire qu'il l'aime: "Et lorsque Cholo vit Rosa apparaître au haut de l'escalier, il allait dire Que tu es belle, en vérité, il pensa C'est vrai qu'elle est excitante, mais il dit Ca fait une heure que je t'attends, j'allais partir sans toi. Alors elle connaît une douce période avec un camarade d'enfance, Spiderman, qui fut laveur de vitres aux Etats-Unis, et qui lui parle avec tendresse, peint sa maison en blanc et bleu, plante des fleurs, joue avec les enfants, et soigne une renarde salement blessée. Petite, elle voulait s'enfuir avec le rossignol Joselito, impliqué dans des trafics de drogue aujourd'hui. Son frère est muet, à l'esprit endormi, et chevauche un cheval blanc qui parle. Lui aussi connaît une histoire d'amour avec Beatriz, tout un programme, qui se conduit avec lui comme une dame avec son chevalier, et qui s'en va sans lui dire adieu. Avec cette histoire, on baigne avec bonheur dans le merveilleux. C'est "comme respirer la brume d'une mer antique". La châtelaine du village, très âgée, est une sorte de mère pour elle, elle lui parle de ses hommes, trois comme Liz Taylor, non? ou Marylin Monroe, lui lègue ses bijoux avant de mourir; personnage de conte, elle mène paître ses brebis qui vont mourir autour d'elle.
Les personnages principaux morts sont des animaux, avatars de défunts habitants du lieu, Don Xil, le curé devenu rat, qui apprit à Rosa que celles qu'elles croyait saintes, ces figures de femmes très belles sur les murs de l'église, sont des pécheresses, et Toïmil, le corbeau, antérieurement protonotaire, "aussi droit qu'élégant", du roi de Galice.
L'auteur signale que la légende contemporaine véhicule un sentiment d'abandon, quelque chose de terriblement actuel. Rosa n'est pas une épouse heureuse, Simon meurt à la quête de son aimée, la châtelaine meurt seule, Toïmil est amoureux de Rosa. Cependant, dans l'enchantement, les corbeaux écoutent et rapportent leurs histoires. La mer recueille Simon. C'est en cela peut-être qu'on parle de la littérature de combat, comme on le dit du taureau, de Rivas engagé auprès des humbles. de plus, Mario Benedetti disait qu'il était difficile d'écrire un conte, ici Rivas, qui plus est, l'insère dans la modernité.
Ce livre, dont le titre provient d'un poème d'Eduardo Pontal, dont un extrait est placé en exergue, est irrigué de poésie. Il n'est pas facile d'accès, mais il emporte par son regard porté sur les gens- Elle chantait des chansons, de ces chansons qui mettent la mer dans la radio la nuit- le naturel avec lequel la vie quotidienne est rendue -Et vous, vous croyez en Dieu? _Tranquillement, dit Mohamed- la noblesse des personnages, et son écriture "pleine d'oiseaux" comme il est dit de la tête d'un personnage dont "on ne savait pas bien ce qu'il inventait et ce qu'il n'inventait pas".


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