AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Carolina78


Je viens de discuter avec La petite menteuse. Les livres sont mes amis ou ennemis. Nous confrontons nos points de vue, et parfois je leur demande des éclaircissements - ce qui leur fait un grand plaisir, pervers ou bienveillant, car pour eux c'est jouissif de créer des quiproquos, de semer le doute, voire carrément de tromper -.

Suite à cet échange, je suis forcée de refaire ma critique passée, et ce n'est pas exclu, que je doive encore recommencer.

J'ai été étonnée, en naviguant sur Babelio, qu'à ma connaissance, aucun lecteur ni même l'auteure elle-même, n'est relevé l'ironie du titre La petite menteuse, si mignonnet - on s'attendrait presque à un conte pour enfants, à moins que ce ne soit une accroche marketing-.

Beaucoup de lecteurs critiquent ce titre qui dévoile l'intrigue, alors que pour moi l'intérêt de ce livre n'est pas l'histoire mais le passionnant débat d'idées qu'il soulève.

Pascale Robert-Diard le dit elle-même, dans l'interview du festival 2022 « le livre sur la place » de Nancy : « La question centrale ce n'est pas tellement de savoir pourquoi elle a menti, mais pourquoi les adultes ont eu tant envie de la croire ».

L'auteure est journaliste, donc par définition elle est soumise à un devoir d'objectivité, mais c'est une vérité de la Palice, elle est aussi un être humain, et qui plus est, une femme. Elle va donc pouvoir s'exprimer à partir de son personnage, Alice, qui est la vraie protagoniste – non pas Lisa Charvet -. Elle dit, toujours dans l'interview citée ci-dessus, que la question du mensonge la taraudait depuis longtemps.

Si Alice s'intéresse tellement à cette affaire, c'est parce qu'elle sort de l'ordinaire, parce qu'elle déclenche en elle toutes sortes de sentiments contradictoires entre lesquels elle ne pourra pas trancher, d'ailleurs c'est pour s'aérer l'esprit qu'elle va nager dans l'eau glacée.

« Je vais défendre la petite salope. La petite menteuse.
Oui, défendre »

Lisa est une salope mais elle est petite, pour Alice elle est comme un miroir qui la transporte dans le passé, qui lui remémore la période maudite de ses années collège, avec l'éveil à la sexualité et les cruelles conséquences qui peuvent en découler.

Lisa est-elle coupable ou victime d'avoir de gros seins ?

Cette affaire est aussi une affaire de femmes : Lisa veut être défendue par une femme, seule une femme peut comprendre pourquoi elle a menti.

Qu'est-ce que la vérité ?

Les excès de MeToo peuvent nous rappeler les zones d'ombres les plus noires de notre histoire, mais force est de saluer la libération de la parole des femmes.

La petite menteuse n'est pas seulement destinée à nous faire réfléchir, mais aussi à nous instruire sur le monde de la justice.

Alice nous livre une perception assez caricaturale de ce milieu avec des "juges bornés, biberonnés à la moraline", des surnoms donnés aux jurés, comme Gepetto, des "hommes kleenex" comme Marco Lange… ». J'apprends les rouages de cette institution qui m'est inconnue. Je découvre que les jurés peuvent être récusés par l'avocat de l'accusé, que dans les affaires de viol, la plaignante peut exiger le huis clos…

Ce livre est un modèle du genre, un condensé de la preuve par l'exemple. Chaque situation, chaque personnage, presque chaque mot, a été choisi pour étayer les propos de l'écrivaine.

Bilan mitigé. La petite menteuse m'a tenu, et me tient, en haleine, mais il ne m'a pas pris aux tripes. Pour moi, le cas Lisa Charvet a été construit de toutes pièces, c'est une oeuvre que je qualifierais de didactique. J'aurais préféré que Pascale Robert-Diard, la femme, prenne l'avantage sur la journaliste.

Postscriptum : J'aimerais bien avoir une explication de comment "chinchards" (poissons) devient "résidents secondaires" pour Léo.
Commenter  J’apprécie          170



Ont apprécié cette critique (17)voir plus




{* *}