AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de Presence


Ce tome regroupe les 5 épisodes de la minisérie, initialement parus en 2014, écrits par George Romero, dessinés et encrés par Alex Maleev, mis en couleurs par Matt Hollingsworth. Ce tome bénéficie d'une courte introduction de Stan Lee expliquant que George Romero a introduit un commentaire social dans les films de monstres, à la même époque où lui Stan Lee écrivait des épisodes de comics engagés. le titre de cette histoire qui devrait compter 3 actes (dont ce tome est le premier) renvoie aux Living Dead, écrits et réalisés par George Romero : Trilogie des morts vivants, Land of the dead, le territoire des morts, qu'il n'est pas besoin de connaître pour apprécier le récit.

Une épidémie de zombies (living dead) a eu lieu sur Terre, et la civilisation américaine en a pris un coup. À New York, l'armée réussit à maintenir des quartiers non infestés. Chandrake (le maire) a fait convertir le stade de Central Park, en arènes modernes où s'affrontent des zombies. Ces derniers semblent avoir un peu évolué, ils sont capables de pensées primaires, et d'un début d'autonomie. Penny Jones est une femme médecin qui a obtenu l'autorisation de suivre un groupe de soldats durant leur patrouille. Elle fait connaissance avec Paul Barnum, le capitaine et lui explique que son objectif est de pouvoir récupérer un zombie pour essayer de l'éduquer. Pendant ce temps là, Bill Chandrake se procure du sang, sans respecter les consignes de discrétion de son oncle (le maire), car il n'y a pas que des zombies à New York. Il y a aussi des vampires (comme en atteste la marque de morsure sur la couverture).

Alex Maleev réalise des cases avec une approche réaliste, en épaississant certains traits, pour exagérer les ombres, créant ainsi une impression d'individus et de lieux marqués par l'usure, le temps qui passe, ou le poids des contraintes. Ses décors donnent une impression de photographies retouchées et simplifiées, avec là encore un encrage qui insiste lourdement sur certains traits. Cette approche graphique génère une impression de réalisme, sans toutefois aller jusqu'au photoréalisme (le niveau de détail et de précision est moins important), en installant une ambiance pesante.

Ses dessins donnent une forte identité visuelle à chaque personnage, ainsi qu'une forte impression qu'ils évoluent dans des décors naturels. La gestion du niveau de détail fait que les images ne s'inscrivent pas dans le genre gore. Maleev édulcore les plaies béantes des zombies et les scènes de carnage, préférant accentuer l'impression, plutôt que de rechercher l'exactitude clinique. Ce parti pris présente l'inconvénient de montrer des zombies dessinés à gros traits, il présente l'avantage de transcrire leur décomposition, leur manque d'intelligence, et leur dangerosité. Malgré l'évolution de leur comportement, le lecteur ne peut jamais oublier qu'il s'agit bien de morts vivants.

George Romero a conçu une intrigue, avec plusieurs fils narratifs. Il y a donc la présence de vampires, mais aussi l'évolution intrigante des zombies dont une partie se retrouve intégrée dans les jeux du cirque. Il y a également cette expérience menée par Penny Jones pour déterminer jusqu'à quel point il serait possible d'éduquer certains zombies pour les rendre utiles pour la société. Enfin, il y a Dixie (une jeune femme qui n'a pas froid aux yeux) qui représente les intérêts d'un groupe non identifié qui ne recherche pas le consensus mou, mais plutôt le profit par la violence.

L'intrigue est donc consistante, et le degré de suspense suffit pour que le lecteur soit intéressé à tourner les pages. Bien évidemment, il est possible de voir dans les zombies et les vampires des allégories de certaines couches de la société. de ce point de vue, Romero ne recherche pas la subtilité, mais plutôt l'efficacité. Les zombies représentent donc les masses laborieuses, cette grande majorité silencieuse qui se conduit comme un troupeau de moutons et qui est facilement exploitée par les dirigeants de toutes sortes. Ils servent ici de gladiateurs bon marché et féroces, pour les jeux du cirque, afin de divertir la populace. Ils restent dangereux et incontrôlables quand ils sont en bande, une foule sans cervelle.

L'allégorie des vampires n'est pas plus compliquée à déchiffrer. Il s'agit d'individus qui se cachent du grand public, qui boivent le sang des gens (aspirant leur fluide vital) et qui cherchent à maintenir leur hégémonie à tout prix. le lecteur pourra au choix y voir les représentants du monde de la finance, de grands capitalistes, ou encore des dirigeants n'ayant qu'un seul objectif en tête (se maintenir au pouvoir en maximisant les profits, en utilisant les forces vives du peuple).

À l'issue de ce premier acte, le lecteur a plongé dans un monde en déliquescence, où les forts continuent d'exploiter les faibles, où la majorité silencieuse semble un peu moins bête que le décérébré de base (mais pas de beaucoup), et où la mort peut survenir de manière arbitraire. D'un côté il s'agit d'un récit d'horreur intelligent ; de l'autre le lecteur aurait été en droit d'attendre une horreur plus viscérale, ou une métaphore plus développée.
Commenter  J’apprécie          20



Ont apprécié cette critique (2)voir plus




{* *}