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Critique de maevedefrance


Kevin Brace, animateur radio vedette déclare un matin à M. Singh, livreur de journaux de 74 ans et ancien mécaniciens en chef des chemins de fer indiens : "Jel'ai tuée, monsieur Singh, je l'ai tuée", en parlant de sa femme, Katherine Torn, qui gît morte dans la baignoire de l'appartement. Brace n'oppose aucune résistance quand l'agent de police Kennicott vient l'interpeler suite à l'appel téléphonique de M. Singh. Et il n'ouvrira plus jamais la bouche tout au long de l'affaire, se réfugiant dans un mutisme qui affligera autant son avocate, Nancy Parish que l'inspecteur Ari Greene et le procureur adjoint Albert Fernandez, ne communiquant plus que par messages griffonnés sur une feuille et ne révélant aucun indice supplémentaire.

L'originalité du récit repose sur le fait qu'a priori le meurtrier est déjà connu du lecteur et des enquêteurs. L'intrigue repose sur le motif du meurtre et le fait qu'il y ait eu ou non préméditation. C'est du moins ce que l'on croit pendant une bonne partie du livre. Cependant, au fur et à mesure de l'enquête, on découvre que l'affaire est plus complexe qu'elle n'y paraît et surtout que dire "Je l'ai tuée" ne veut pas forcément dire être coupable de meurtre. Robert Rotenberg montre ici un monde judiciaire un peu trop pressé de classer les affaires et de désigner les coupables. Il montre du doigt des procureurs qui n'hésitent pas à commettre "des actes contraires non seulement à la légalité de la procédure mais aussi à leurs obligations devant la cour" pour mieux barrer la route à un jeune procureur débutant et prometteur, Albert Fernandez, fils d'ouvriers et immigré chilien.

Tout au long du roman on découvre la part d'ombre des personnages. Robert Rotenberg cherche là aussi à aller au-delà des apparences. L'agent Kennicott est en fait un ancien avocat reconverti, suite au meutre de son frère et à l'assassinat de ses parents par un chauffard ; Ari Greene, inspecteur de police est fils de rescapé de la Shoah et amant de Jennifer Raglan, chef des services du procureur; la victime, Katherine Torn, était alcoolique et très violente (elle a brisé les cordes vocales de sa mère en tentant de l'étrangler) et elle était la seconde épouse de Brace, lui-même père d'un enfant autiste, qui a été retiré à la garde de sa première femme, Sarah McGill; Sarah McGill est resté en très bon terme avec son ex-mari qui l'aimait toujours, ce que ne supportait pas Katherine. Au fil du récit, les évidences deviennent des incertitudes. Et c'est bien sur une incertitude que se conclut l'intrigue, mais aussi sur une victoire (qu'un innocent ne soit pas condamné à 25 ans de prison) grâce à une équipe volontaire de policiers, juges et avocat, soucieux des procédures, et attentifs aux détails.

Ce roman policier a également l'originalité de mettre en scène à la fois le monde de la justice et celui de la police, celui du petit monde grouillant et sans pitié du Old City Hall de Toronto (titre V.O. du livre, d'ailleurs). le suspens devient de plus en plus haletant au fil des pages. le style simple, reposant sur de nombreux dialogues et une description des problèmes contemporains de Toronto (les embouteillages!) en font un livre agréable à lire dans lequel on s'immerge facilement.

C'est le premier roman de l'auteur, avocat de son état. Et je pense qu'on risque d'en entendre reparler. Une belle découverte.

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