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Critique de jg69


Une fille qui raconte sa mère, voilà un sujet devenu bien banal en littérature. Mais quand la mère s'appelle Sonia Rykiel et quand la fille Nathalie est écrivain, cela donne un très beau récit.

Une fille qui dit "Être ta fille. La grande aventure de ma vie..." et qui va nous dévoiler ici la relation fusionnelle qu'elles ont eue toute leur vie car ces deux-là n'ont pas passé un jour sans démarrer leur journée par un coup de téléphone et seulement 19 marches séparaient leurs deux appartements..."Mon sujet ce n'est pas toi, c'est nous. Nous deux. Ce que tu as fait de moi. Ce que je t'ai laissé faire de moi."

Nathalie nous raconte dans ce livre les débuts de sa mère, l'élément déclencheur, le drame "une sentence qui a déclenché le gong d'une autre vie pour Sonia" qui l'a faite se lancer. C'est le succès immédiat et Sonia devient la Reine du tricot.
Nathalie décrit une femme éminemment libre qui n'écoute que son désir "Ta plus grande intelligence c'était ta liberté" auprès de qui elle dit avoir tout appris rien qu'en la regardant, une femme qui la fait défiler à 20 ans, un "cadeau empoisonné", un moyen de la garder auprès d'elle le reste de sa vie... Puis Sonia charge sa fille de l'organisation des défilés. Nathalie a travaillé dans la mode alors que cela ne l'intéressait pas particulièrement, un "hasard ombilical" mais elle a tellement aimé faire équipe avec Sonia...
Sonia est une mère qui garde toujours les commandes, qui contrôle tout et se montre étouffante "Tu ne me laisseras jamais partir. Horrible et tellement rassurant". Elle modèle sa fille à son image. Nathalie a eu les mêmes goûts que Sonia et reconnait ne pas avoir eu d'existence propre pendant longtemps . Comment exister auprès d'une telle femme, d'une telle mère? qui lui prend tout "Non maman, c'est moi qui ai mal à la tête, tu ne peux pas tout prendre, tu ne peux pas tout avoir, moi et mon mal de tête, laisse-moi au moins ça."

Une grande partie du récit est consacrée aux dernières années de Sonia atteinte depuis 20 ans de la maladie de Parkinson. Nathalie doit un jour l'empêcher d'aller saluer à la fin des défilés. Ensuite ce sont les cinq dernières années quand Sonia finit diminuée et dépendante, quand les rôles s'inversent avec Sonia qui appelle Nathalie "maman", "Tu m'appartiens maintenant, à moi qui t'ai si longtemps appartenu." Nathalie découvre alors une autre femme dans son grand âge, c'est une période où Nathalie est angoissée par l'après, où elle finit par décider d'arrêter d'attendre qu'elle meure, d'arrêter de se préparer à sa mort, d'arrêter de se demander comment ce sera quand sa mère ne sera plus là.

"J'ai perdu ma mère ma moitié ma crème et ma frayeur, ma beauté et ma douleur. Avec toi j'ai vécu le plus beau, j'ai connu le plus dur."

J'ai beaucoup aimé ce témoignage sur une relation hors norme, sur une éducation où il y avait "une sorte de ligne de conduite mais pas tellement de recettes", j'ai aimé cette immersion dans le monde de la mode, j'ai aimé le portrait de Sonia, femme libre et séductrice, grande bâtisseuse, une pionnière qui a fondé un empire et qui ne craignait pas de s'auto-proclamer Reine du monde;
Mêlant le "je" et le "elle" pour tenter de mettre distance, Nathalie nous livre le très beau témoignage d'une fille qui a toujours cherché à protéger sa mère et qui a compris que la réparation était un élément fondateur de leur relation.
Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
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