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Critique de belette2911


Voilà un roman pas comme les autres, déstabilisant, notamment dû au fait de l'absence de majuscules en début de phrase, de points finaux, de l'avarice de virgules et de tirets cadratins ou de guillemets pour signaler les dialogues.

Un alinéa pour signaler le début d'un nouveau paragraphe et un double alinéa pour les dialogues, c'est tout. Perturbant pour moi, mais je m'y suis vite habituée.

Comme je l'ai souvent dit, la taille d'un livre n'est pas importante (pour le reste, je vous laisse seul.e juge).

La preuve une fois de plus : 159 pages d'une noirceur absolue, faite de fausses accusations de sorcellerie et de tortures, de fausse justice, de médisance, de peurs, de superstitions, de pouvoir et de religion toute-puissante.

Dans l'Allemagne du XVIe siècle, une personne comme Anna Thalberg dérangeait : elle était jolie, avait les cheveux roux, les yeux couleur de miel et pire encore, elle venait d'ailleurs ! Oh, pas du bout du monde, même pas d'un autre pays, juste d'un village plus loin… Mais je n'ai pas besoin de vous faire de dessin sur la noirceur humaine et ce que certains sont prêts à faire pour se débarrasser d'une personne qui les dérange.

L'accusation de sorcellerie est LE truc génial que l'on a inventé pour éliminer celles ou ceux qui gênent. Impossible de prouver que vous n'en êtes pas une et sous la torture, tout le monde avouerait n'importe quoi.

Kafkaïen sera son procès : elle est coupable, point à la ligne. Si elle avoue, elle renforce l'accusation et si elle n'avoue pas sous la torture, alors c'est qu'elle est aidée par le Malin, le Diable, l'antéchrist… Bref, entre la peste et le choléra, le choix est maigre.

Et puis, il ne pleut plus depuis longtemps, c'est la faute d'Anna et sa mort servira de sacrifice et il pleuvra, sans aucun doute… Son avenir est déjà tout tracé. La justice ? "Mes couilles, ti", comme le dirait si bien Fabrizio le carolo (les Belges comprendront).

La force de ce roman, c'est la confrontation entre Anna et Melchior Vogel, le grand inquisiteur, le salopard qui l'a condamnée à la torture. Jamais elle ne baissera les yeux. L'autre point fort, ce seront les longs entretiens entre Anna et Hahn, le confesseur inquisiteur. Anna est une femme forte, droite dans ses bottes et elle ne lâchera rien.

Tous les genres se mélangent, dans ce court roman, intense : la politique, la religion, l'histoire et la philosophie. Il est difficile de ne prendre ce roman qu'au sens littéral, tant il a des niveaux de lecture qui s'entremêlent, harmonieusement, puisque tout est lié.

Le côté historique est bien rendu, sans devenir indigeste, et le côté politique entre en ligne de compte parce qu'avec ces procès en sorcellerie, les puissants gardent le pouvoir et tiennent tout le monde sous leur coupe. Idem pour le côté religieux, avec l'opium du peuple, on les fait marcher droit, on leur fait peur.

La philosophie intervient dans les questionnements : qu'est-ce qu'il y a après la mort ? Ainsi que dans le fait que certains croient mordicus être les détenteurs de la vérité sur Dieu, qu'il leur parle à eux, qu'ils sont élus et que c'est à eux que revient l'indicible honneur de faire marcher tout le monde droit.

Le final est superbe, prouvant que la vie ne manque jamais d'ironie, ni d'humour noir et que la roue tourne…

Un roman étrange, dérangeant, court, qui m'a sorti de ma zone de confort.

Lien : https://thecanniballecteur.w..
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