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Critique de Bibalice


Le rêve de l'homme lucide est à peu près le roman que tout insomniaque a un jour rêvé d'écrire. Toutes les angoisses, les phantasmes (Mr Ségur écrit ce mot ainsi et ça tombe bien, moi également) et les problèmes qui découlent des longues nuits d'insomnies forment le point de départ de ce roman en forme de règlement de compte avec soi-même.

L'histoire ? Un homme, Simon Perse, décide d'arrêter de dormir. Les insomnies le tuent à petit feu mais les fragiles moments de sommeils sont pires que tout. Il se réveille en plus mauvais état que lorsqu'il s'endort. Alors, couteau à la main et, surtout, médicaments dans l'autre, le narrateur décide de tuer la bête. D'aller au bout du processus. de ne plus dormir. de ne plus jamais dormir.
Ce roman est le récit de cette chute improbable -ou de cette renaissance.

Tout au long de ces 400 pages, Simon Perse s'enfonce dans un rêve éveillé. Il s'"absente" dans telle vie, se réveille dans telle autre jusqu'à en perde le fil de la réalité.
Mais quelle est la réalité ? Celle de Simon Perse ou bien celle de ses personnages qu'il invente au fur et à mesure de ses pérégrinations mentales ?

Le passage le plus remarquable de ce roman, qu'on jurerait écrit par Paul Auster, est la confrontation entre Simon et une mystérieuse jeune femme sortie d'on ne sait où et qui sait tout de lui. Succube des ténèbres ? Alter ego féminin du narrateur ? de l'auteur ? Ange gardien de papier ? C'est à ce moment que le roman bascule : à une réflexion sur le sommeil et sur le sens de la vie, de ses besoins et de ses démons, s'ajoute une réflexion sur l'écriture et l'imagination. Peu à peu, attention spoiler, Simon Perse laisse la place à Philippe Ségur, le véritable "je" du roman. En cherchant les causes profondes de son malheur et de son absence de sommeil, Philippe Ségur s'interroge non plus sur lui même mais sur ses créations. Réflexion toute Paul Austerienne absolument passionnante mais qui, Dieu merci, ne sort jamais du récit.

Certaines scènes font de ce roman un chef d'oeuvre d'humour. Ce sont ces scènes de dialogues absurdes entre le narrateur et le psy. Un psy freudien qui pratique régulièrement la technique de l'attention flottante. Ces scènes de confrontation entre ce psy mutique et ce patient désemparé sont à mourir de rire, quelque soit la vision que l'on peut avoir de la psychanalyse (même si ceux qui la portent en horreur trouveront certains passages particulièrement savoureux !).

Entre l'humour absurde et cruel des séances de psy et la réflexion passionnante de l'auteur-narrateur sur le sommeil, le sens de la vie et la création littéraire, ce livre est au final un petit chef-d'oeuvre inespéré. L'auteur prend son temps certes, et d'aucuns critiqueront ses longueurs. Mais vous seriez mal avisés de passer à côté tant ce livre regorge de richesses. Et encore, je ne vous ai pas parlé du style, en tout point admirable.
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