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Critique de Tamm


Tamm
03 février 2024


Un récit émouvant sur le deuil, les liens et les conflits familiaux qui illustrent les fractures de la société israélienne .
Un pan historique peu connu : la résistance juive à l'occupation britannique.
Une plume sous laquelle les émotions prennent vie.


Zeruya Chalev est né dans un Kibboutz dans une famille de pionniers.
À travers ses protagonistes, elle dresse un portrait de la société israélienne et de ses différentes sensibilités. C'est le portrait d'un pays profondément déchiré : des mères patriotes et athées, des pères apolitiques ou anti système, des fils ultra-orthodoxes ou anticolonialistes, des enfants expatriés... La guerre n'est pas le sujet principal du roman mais sa toile de fond, chacun en étant profondément marqué à sa manière.
Les liens familiaux constituent le sujet principal du roman : ceux qui lient parents et enfants, les membres d'un couple, ou même les inconnus que le destin rassemble ; et la douleur ressentie quand ces liens se distendent ou se brisent.
La plume de Zeruya Chalef est forte et les émotions en deviennent matérielles et palpables. Si c'est ça la pathos, j'aime le pathos.
J'ai été particulièrement touchée par Atara, son couple entre passion et insatisfactions, ses doutes, ses regrets sa conception du rôle de mère ainsi que par la manière dont les liens se tissent entre elle et Rachel.

Extraits :
«Eden enfant paradis, qui, dès sa naissance, leur a procuré tant de joie, tant de fierté, que lui est-il soudain arrivé, lui qui a réussi le parcours le plus difficile de l'armée, qui a montré une résistance inattendue et exceptionnelle, qui a surmonté les entraînements les plus épuisants, exigeant de lui-même chaque jour davantage, qui a pris part à des raids et des opérations militaires dont, bien sûr, il ne pouvait rien dire, il ne leur disait donc rien, ni avant, ni après, et seul son regard vide permettait de temps en temps, d'imaginer d'où il venait - un lieu où il n'y avait ni jour ni nuit, ni hésitation ni question, ou seul la mission comptait, plus sacrée encore que la vie humaine. Un lieu où le corps, ce corps chéri qui s'est formé dans son ventre entre espoir et angoisse, cellule après cellule, se muait en arme de guerre sophistiquée et surpuissante, mais gardait sa vulnérabilité de nouveau-né, et c'est ce qu'elle maudissait toutes les nuits. Dans ces cauchemars elle le voyait gisant au fond de la mer, criblé de balles ou en train de se débattre, piégé dans une nasse.»

«Tant d'années elle s'était cru responsable de la santé et du bien-être de ses enfants, à essayer de contrôler et de protéger, de planifier et de diriger, de régler et de gérer, un rôle qu'elle a assumé avec une énergie démultipliée, dévouée corps et âme. Par moment elle se sentait presque invincible car elle disposait de la force inépuisable de la maternité, un pouvoir sans limite qu'elle partageait avec toutes les laies du wadi, toutes les lionnes d'Afrique, toutes les femmes qui, un jour avaient élevé des enfants. Persuadée de pouvoir les protéger contre tous les dangers ; de réussir, à la seule condition d'y mettre toutes ses ressources, sans relâche.»

«Que ton chemin te soit salutaire mon chéri, puisse tu arriver sain et sauf à la destination de ton choix. Voilà ce qu'elle lui écrira, la seule chose qu'elle demande c'est qu'il vive et qu'il soit en accord avec lui-même. Que jamais il n'ouvre volontairement la porte entre le pays des vivants et celui des morts.»

« C'est comme s'il n'y avait plus besoin de mots, car elle sent que Rachel sait, qu'elle la connaît. Aurait-elle, depuis des années, lancé ses racines sur un mystérieux chemin semé d'embûches pour arriver jusqu'à cette vieille dame, tel un arbre poussé sur un sol trop pauvre et qui doit aller puiser son eau et sa nourriture au loin. Oui, peut-être est-ce là la signification du soulagement qu'elle ressent en observant cette main ridée posée sur son bras.»

«Ta vie, biche piégée, les fauves l'ont dépecée et les vautours ont fondu sur le cadavre. Les résidus ont été brûlés par le feu, le vent a éparpillé les cendres »

«Elle n'entend que le bruit des pas du destin qui surgit de la mer, enjambe la vallée. Il va bientôt se dresser devant elle, lui exhiber son sexe sous le nez et elle laissera échapper un cri. »



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