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Critique de Jenndrix


Pour lui est une lecture qui m'a profondément animé. La première partie du récit m'a réellement indigné, je ne comprenais pas cette mère si peu empathique, si autocentré, fulminant contre tout excepté elle. Cette mère marquant les différences entre ses enfants, ayant des propos jugeant, évoquant son fils avec distance, l'étiquetant et le positionnant comme seul coupable de leurs difficultés en se dédouanant de toutes responsabilités, me révoltait. Cette mère qui parce qu'elle a su trouver des acteurs de résilience et s'en sortir face à sa propre histoire douloureuse, ne concédant pas à son fils la possibilité que la sienne soit insurmontable, me crispait. Parce qu'un enfant est le fruit de son éducation, son environnement mais aussi de toutes ces petites choses inconscientes qu'on lui transmet. On n'y peut pas toujours quelque chose, on n'est donc pas forcément coupable mais une chose est sûre, la remise en question doit être de mise.

La deuxième partie m'a un peu réconciliée avec l'auteure, on y lit enfin l'amour et la bienveillance avec parfois même de la compréhension tolérante mais surtout des questionnements. La première partie du récit enferme son fils dans l'échec et la déchéance, la seconde laisse libre et est pleine de compassion et d'attentes.

L'auteure est une femme de la caste des privilégiées qui semble persuadé que « quand on veut, on peut » faisant fi de la société telle qu'elle est. Si certains s'en sortent c'est à priori et à condition que d'autres n'y arrive pas. La société actuelle est construite de sorte qu'il y ait ceux du haut et ceux du bas. Si nous pouvions tous être logés à la même enseigne, il y aurait bien moins de convoitises... Il n'y a surement pas toujours d'explications déterminantes aux ruptures et aux empêchements, il y a la vie et ces blessures face aux rencontres et les ressources que l'on puise en nous.

Je reste dérangé par le récit tel qu'il est présenté, qui titrerait presque de façon voyeuriste : Oyez ce tabou, l'enfant violent face à son pauvre parent ! Je crois que c'est bien plus complexe que cela. Evidemment la violence envers qui que ce soit est inacceptable et intolérable mais être bienveillant ne veut pas dire laxiste et démissionnaire. Il semble nécessaire dès l'enfance de toujours repositionner ses attentes, de confronter ses propres démons pour limiter la passation générationnelle, et surtout, il apparait essentiel de ne jamais figer ses enfants dans ce que l'on imagine d'eux, sous peine qu'il ne puisse plus jamais être autrement. Pesons toujours nos mots pour ne pas déchirer et abimer davantage.

L'histoire de vie de Peggy Silberling est bouleversante et le chemin parcouru est immense mais peut-on dignement penser que parce que nous y arrivons tout le monde peut s'en sortir à force de volonté ? Et finalement qu'est-ce que s'en sortir ? Se conformer ? S'affadir ? Se complaire ? Accepter ? Vivre malgré ? Être bien né ? Avoir eu de la chance ? Être heureux ?

Le récit a des qualités narratives indéniables, une alternance construite comme une intrigue qui pousse à en découvrir toujours davantage. Les passages sur l'enfance de l'auteur son abominablement sublime. L'auteure passe au vitriol son entourage délétère, elle est sans concessions dans sa description des autres mais les fêlures transparaissent et on se demande si finalement cette hargne n'est pas une façon de faire le deuil de son histoire ? D'acter une distanciation avec les meurtrissures pour mieux rebondir ? Si finalement, le discours un peu lisse de la femme sûre d'elle, n'est pas qu'une façade pour éviter l'effondrement ?

Autour de cette lecture :
Deux films récents : My beautiful Boys au désespoir ineffable et l'amour filial véritablement transcendant par Felix van Groeningen également auteur du déchirant Alabama Monroe.
Ben is back de Peter Hedges dont le traitement diffère mais tout aussi poignant.
Les deux portés par des castings talentueux.
Un autre récit: Papa est ce que je peux venir mourir à la maison? de Tony Delsham
Pour la jeunesse : L'herbe bleue d'un auteur anonyme récit ayant accompagné un grand nombres de lecteurs à l'âge fragile où l'on peut basculer aisément.
Un peu de musique : Mano Solo sa voix puissante et ses morceaux déchirants parmi lesquels : Au creux de ton bras ; A quinze ans du matin et bien d'autres.
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