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Critique de Kirzy


«  C'est en avril 1994 que j'ai demandé à Dieu de divorcer. »
Ce sont les premiers mots, très forts, de ce premier roman qui l'est tout autant.
Le «  je » est celui de Sacha, grande reporter française, une femme de caractère habituée à raconter le fracas du monde, qui se retrouve projetée dans les premiers jours du génocide rwandais, le lecteur sur ses traces.

J'aime tout particulièrement les romans qui parviennent à dire la grande Histoire à travers le prisme de l'intime, du personnel ou du familial.
Et là, très clairement, Yoann Smadja a su trouver les mots justes pour évoquer l'enfer dans lequel le Rwanda a basculé à partir de l'attentat qui tue le président rwandais et sert de prétexte aux violences génocidaires envers les Tutsis. Cet ancien humanitaire a oeuvré au Rwanda en 2006, son récit est très documenté, sans doute un peu scolaire par moment mais au moins, cette contextualisation précise permet au lecteur d'avoir une vision complète de la situation et d'en comprendre les enjeux.

Certains passages sont durs, oui, mais sans excès, sans complaisance, juste parce que nécessaire pour comprendre le cheminement psychologique de Sacha dont on voit vaciller les certitudes à mesure qu'elle prend la mesure de la barbarie qui se déchaîne. Car ce très beau roman reste sur les pas de ses personnages principaux. Sacha donc, mais aussi Rose, l'épouse d'un médecin rwandais qui la guide dans le chaos. Rose a disparu avec leur très jeune fils, Daniel la recherche, Sacha aussi.

La très belle idée de l'auteur est de faire parler Rose, la muette, à travers des extraits de son carnet, autant de lettres d'amour écrites pour son mari, des lettres très sensuelles qui racontent le bonheur et le Rwanda d'avant, des lettres terribles qui dévoilent le vécu de Rose durant le génocide.

En fait, tout ce roman est un modèle d'équilibre, à fleur d'émotions. Il aurait pu basculer dans le pathos lourdaud, il ne le fait jamais en croisant les deux regards sensibles de Sacha et Rose. le dernier tiers est vibrant, bouleversant même, grâce à la subtilité avec laquelle Yoan Smadja construit son récit et le fait avancer avec une ellipse temporelle très judicieuse qui propulse le lecteur en 2017 sur une piste inattendue. Je ne l'ai pas refermé désespérée mais au contraire emplie de foi en l'humanité.

Un très beau roman empli de souffle romanesque et de lumière malgré la noirceur du sujet.
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