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Critique de Marie-Nel


Je viens de refermer ce roman, je viens de quitter cette histoire, et j'en suis bouleversée, j'ai un peu le souffle coupé, avec un arrière goût amer. Je découvre Alex Sol et je suis conquise par son écriture et sa façon de raconter une histoire. Il s'agit ici d'un thriller psychologique, et elle a très bien travaillé ce thème. Ce qui surprend dès le départ, c'est le choix narratif. En effet, elle emploie la deuxième personne du pluriel pour faire parler son personnage principal. Ce « vous » fait rentrer le lecteur dans la tête de l'héroïne. C'est comme si quelqu'un était en train de détailler le moindre geste que vous pourriez faire. Je suis d'habitude friande de l'emploi du « je » qui me permet de me rentrer dans la tête du personnage et de ressentir au plus près tout ce qu'il se passe pour lui. Mais là, j'ai été bluffée par ce « vous » qui fait le même effet, et je dirais même qu'il en fait encore plus. Il vous interpelle, vous invective, vous parle, vous détaille tout. Je n'avais encore jamais rencontré cette façon de faire, il m'a fallu un petit temps d'adaptation, mais passé une dizaine de pages, je me suis sentie dans la peau de cette femme. J'avais pris possession d'elle ou elle de moi, je ne sais pas et j'avais alors l'impression de raconter mon histoire.

Je me suis donc retrouvée dans la peau de Karen. Elle vit dans le sud de la France, elle est d'origine anglaise et il lui arrive bien souvent de mélanger les deux langues. Elle vit seule avec sa fille, Judith. Un soir, alors qu'elles sont tranquilles chez elles, elles voient arriver leur voisine Marion, complètement affolée. Un homme serait arrivé chez elle et l'aurait agressée. Elle a réussi à se sauver et à venir se réfugier chez Karine. Elles vont ainsi s'enfermer chez Karen, celle-ci va condamner toutes les ouvertures, les fenêtres, les volets, les portes. L'homme est là, il frappe à la porte et demande à voir Marion. La peur va ainsi s'installer. Et un huis-clos va se mettre en place avec les trois femmes dans la maison et l'homme à l'extérieur qui va tourner autour et vouloir entrer à tout prix. La panique s'installe, Marion a peur, tellement peur qu'elle s'imagine ne pas être en sécurité chez Karen. Et dans ces cas-là, la peur et la panique font faire des choses impossibles à imaginer en temps normal. Tout cela ramène de mauvais souvenirs pour Karen qui a un passé très douloureux. Elle va remonter des années en arrière, au moment où elle a rencontré son mari, et surtout jusqu'à cette nuit dix ans plus tôt, où son monde s'est écroulé et où tout a changé à jamais pour elle et sa fille.

Je ne vais pas pouvoir vous en dire davantage, ce serait vraiment trop dommage de vous dévoiler l'intrigue ou les événements. Il faut absolument que vous le découvriez en n'ayant seulement lu le résumé, comme je l'ai fait. Les révélations sont de taille, plus on avance dans le roman, plus on en apprend sur le passé de Karen, et on ne peut qu'être horrifié par tout ce qu'elle a pu vivre. le suspense est double et affreux. Il y a celui que l'on vit par rapport aux faits du présent, savoir ce qu'il va se passer pour les trois femmes dans la maison, si l'agresseur va arriver à entrer, si elles vont arriver à s'en sortir, appeler des secours. Et il y a le suspense engendré par le passé de Karen, on voit les dates défiler, on la voit sombrer de plus en plus dans l'horreur et on se demande comment elle a fait pour être encore là dix ans plus tard. L'histoire est glaçante, elle fait mal, elle vous remue, elle prend aux tripes. J'ai ressenti beaucoup de peine et de colère, mais également du dégoût, de l'aversion, de la haine. J'ai eu des envies de meurtre avec certaines révélations. J'ai dû parfois faire des pauses dans ma lecture, pour reprendre ma respiration, reprendre de l'air et digérer les faits. Et en même temps, je n'avais pas envie de m'arrêter pour savoir si tout allait se résoudre positivement, et connaître enfin le passé entier de Karen.

Ce stress et ce suspense sont bien travaillés par l'auteure. Elle alterne les chapitres entre le passé et le présent, et on quitte à chaque fois l'un d'eux avec une action percutante qui fait que vous avez envie de sauter des pages pour aller voir la suite. J'aime bien ce procédé dans les romans. Je trouve que ça donne beaucoup de rythme à la lecture, cette soif de savoir fait que j'avais souvent l'impression que mes yeux ne lisaient pas assez vite. Donc cette construction plus le style de narration font que j'ai accroché à ma lecture et que je n'ai pas réussi à la quitter. L'auteure ne fait pas de pauses, et en même temps, elle ne fait pas non plus dans la surenchère, elle raconte simplement les faits. Des femmes comme Karen existent, malheureusement. Ça ne devrait pas, il ne devrait pas y avoir de femmes comme elle, et pourtant on en entend tous les jours ou presque dans les actus. Les coups physiques s'accumulent à la pression psychologique et il faut essayer de protéger le plus possible les enfants. La culpabilité fait alors son apparition, et empêche de se confier ou d'aller voir les autorités compétentes, et le cercle vicieux s'amorce et il est très difficile de s'en sortir. Alex Sol traite de tout cela avec beaucoup de lucidité et sans fards. Elle ne cache rien, ne prend pas de précautions, c'est dur, c'est difficile à lire, mais c'est malheureusement la réalité. Et quelle réalité.... des romans comme ça sont nécessaires, ils doivent être lus, même si ça remue, même si c'est très dur, il le faut. Pour être vigilant, pour aider son prochain si on a des doutes sur sa sécurité, le silence est la meilleure arme de ces salauds...

Je pourrais vous parler encore longtemps, j'aimerais le faire, surtout avec ceux qui ont lu ce livre, pouvoir parler du sujet sans spoiler les futurs lecteurs. Tout comme le reste de l'histoire, la fin est imprévisible et cueille le lecteur en plein désarroi. J'ai refermé ce livre avec un goût amer et triste. Mais il aurait été bizarre que ce soit autrement. C'est un livre nécessaire, qui est dans l'air du temps et qui parle de faits de société graves et d'actualité. Karen, ce pourrait être moi, vous ou la voisine. Trop de femmes vivent encore de tels faits, et c'est atroce... Ce livre remplit son rôle de transmettre un message à chacun de nous, et de pointer le doigt sur un fléau pour lequel nous ne faisons pas encore assez, enfin, à mon avis.
Une chose est sûre, c'est que Alex Sol est une auteure à suivre. Son style et sa façon de raconter font que j'ai déjà envie de lire un autre roman écrit par sa plume. Je ne peux que vous recommander cette lecture. Elle est dure, difficile, mais comme je le disais plus haut, elle est nécessaire. Vous verrez que vous vivrez un moment de suspense et de tension intenses et qu'il vous sera difficile d'oublier Karen. Moi, je ne l'oublierai pas de sitôt. Elle et son histoire m'ont marquée à vif.
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