AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
>

Critique de meeva


C'est en plein dans « les années sombres ».
Quoique, « je sais pas trop ».


Mano nous fait passer quelques jours avec joseph, à bord d'une péniche, sous la pluie.
Il nous déroule et nous tord les tripes, on sent la puanteur vaseuse de son espoir noyé sous la pluie.

Il raconte quelques journées passées seul avec lui-même à combattre les fantômes qui l'habitent à ce moment-là.
Quelques journées à fumer, à boire, à chier, à ressasser des idées noires, des désespoirs… qui lentement vont se muer en espoirs quand il va se tourner à nouveau vers les autres, vers la vie.

Séropositif depuis 1986, Mano combat le sida depuis quelques mois en 1997, lors de la publication de « Joseph sous la pluie ».



Joseph/Mano, c'est un type qui a la tchatche et un sourire à vous submerger accroché à une gueule d'ange.
De quoi faire chialer les filles.
Mais la maladie a sali son corps. Il était déjà le serpent qui vous tente, il devient aussi la pomme empoisonnée d'un venin qui le détruit tout autant qu'il menace celles qu'il aime.


Et la plupart des pensées de Joseph vont vers elles, les femmes de sa vie, résumées en deux symboles.
Cheveux blancs : il l'aime mais elle le fait souffrir en lui donnant de la haine en réponse à son amour.
Cheveux noirs : c'est lui qui la fait souffrir, en lui apportant la mort en réponse à son amour à elle.



Mano était rempli de contradictions, plein de talents et super émouvant (oui, oui, bien sûr que je lui porte l'amour éternel d'une groupie – que je n'ai pas été cela dit…) et en même temps hyper orgueilleux et avec un caractère de petit con, mais en plus il en avait conscience, ce qui appelle à coup sûr l'indulgence.



Il allait jusqu'à penser, dans ses moments les plus noirs que les gens l'aimaient parce qu'il souffrait à leur place et que sa souffrance était si belle…
Mais assurément, ce sont les mots qu'il collait sur sa souffrance qui étaient si beaux.

« Dans ma tête résonnaient tes insultes, l'air était de plomb et mon corps s'écrasait sous les pressions. J'aurais voulu qu'il ploie, qu'il se brise comme un arbre trop sec, qu'il croule sous la charge et que s'effondre cette instinctive résistance qui tient debout la somme de malaises que je suis, sous ma couche de chair avariée, viciée, sale et abritant la vermine, tombereau d'immondices à la gueule d'ange et au coeur de lave refroidie. »



Ces mots que Mano semble jeter, cracher, vomir… Ces mots qui claquent, qui déchirent, qui bavent, qui collent…
Des mots pourtant apprivoisés, pensés, donnés et même offerts, pour transmettre, pour partager, pour réveiller ou endormir des tourments…

« Je suis là. Je marche mes trente-trois ans et je me demande combien de fois une vie peut-elle basculer de combien de naufrages peut-on se retrouver chié épuisé sur une plage aux vapeurs mortelles de marée noire […] »



On dit que c'est la souffrance qui s'exprime le mieux dans l'art. Mais on est souvent assez seul dans la souffrance, alors n'est-ce pas une bonne façon de la supporter et de s'en distraire en l'exprimant dans l'art ?
Tandis que le bonheur est souvent partagé et surtout, on se contente souvent de s'y adonner et d'en profiter plutôt que de le faire partager.


Et Mano Solo a su aussi sublimer dans son art des choses bien plus optimistes quand il s'est tourné vers les autres, vers le reste du monde, dans son album « dehors » par exemple.
Et la chanson éponyme de l'album me semble une vraie merveille pour exprimer une joie, une paix de l'esprit, un bonheur de la vie.



J'aurais aimé pouvoir lire d'autres écrits de Mano à d'autres périodes de sa vie, quand il était plus en paix avec lui-même.
Ce livre contient aussi des poèmes et des dessins, nous permettant de toucher du doigt l'univers rempli d'émotions de Mano Solo.

C'est beau, c'est Mano Solo...



La chanson, pour l'ambiance est celle, de Mano Solo bien sûr, qui à mon avis, colle le mieux à ce livre.
Avec des paroles poignantes, elle s'écoute sans déprimer grâce à la musique, qui contrebalance la tristesse de tant de lucidité :


« La liberté se paie
D'un linceul de regrets
Mais ai-je vraiment eu tort
Tous les chemins ne mènent-ils pas à la mort
Qui n'échangerait pas cent ans d'ennui
Contre trente-cinq ans de vie
J'ai voulu voler pas voulu marcher
Voulu réchauffer ma couenne de papier

J'ai joué avec le soleil
Qui m'a cramé les ailes
Mais je l'ai vu de si près
Que peu de gens peuvent en dire autant

J'ai vécu si fort
Que j'ai tué ce corps
Fondu désintégré en plein élan
Comme une statue éphémère
En suspens dans l'air
Les plus belles femmes du monde
Se sont penchées sur mon cas au moins cinq secondes
J'ai été riche à millions
De tous ces petits corps si mignons
La liberté ou la mort
J'aurai eu les deux
La liberté ou la mort
C'est mieux que finir vieux
[…] »

Extrait de « la liberté ou la mort », dans l'album « Je sais pas trop », Mano Solo :
https://www.youtube.com/watch?v=eFEGnlCepX8
Commenter  J’apprécie          187



Ont apprécié cette critique (15)voir plus




{* *}