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Critique de kuroineko


Il est des livres qui marque la mémoire au fer rouge. My absolute darling en fait partie, ô combien! Quand on sait qu'il s'agit du premier roman du jeune auteur de 31 ans, c'est à la fois admirable et inquiétant.
Admirable car son récit est vraiment une réussite, abouti et construit avec une maîtrise impressionnante.
Inquiétant par le fonds même de l'intrigue d'une noirceur oppressante et terrifiante.

Lorsque mon libraire m'a chaudement recommandé cette nouveauté éditée chez Gallmeister, il m'a derechef prévenue que c'était "plutôt sombre"... Doux euphémisme que ce plutôt... Lui-même avait été littéralement scotché par la qualité de ce premier texte. Comment ne pas l'être? Si j'en crois les avis qui se multiplient sur Babelio, l'Américain a conquis d'emblée son lectorat.

Et pourtant, ce n'est pas une lecture facile. Il n'est pas fait pour les amateurs de bouquins détente sans prise de tête. Ni pour les âmes trop sensibles. Gabriel Tallent dresse ici le portrait dérangeant d'une jeune ado, Julia dite Turtle, élevée à la dure (là aussi, doux euphémisme) par un père à l'esprit tordu empreint de réflexions philosophiques et apocalyptiques. Martin aime sa fille; il le lui répète sans cesse. Un amour terrifiant par son absolutisme dévorant et abusif.
Turtle, du haut de ses quatorze ans, galère au niveau scolaire mais est sans égal - merci papa - pour démonter et remonter pistolets et carabines. Les armes n'ont pas de secret pour elle, sa précision de tir est imparable. Là où les autres filles de son âge répandent autour d'elle l'odeur de parfum et de maquillage, elle ce serait plutôt la graisse et les lubrifiants pour fusils et compagnie.
Elle est également confrontée à sa relation au père, lourde et dérangeante. Si elle sent bien que ça cloche, l'emprise affective et psychologique ainsi que l'habitude sont si fortes que la gamine vacille, ne sachant pas où elle en est.

Cette famille atypique vit dans des conditions minimalistes dans une maison qui se déglingue de partie, avec veuve noire dans la baignoire et une plaque de contreplaqué pour lit. Le tout dans un admirable écrin naturel de la Californie du Nord, avec forêts de séquoias, rouleaux du Pacifique et une flore diversifiée que l'auteur détaille à l'envie. Ce cadre à la beauté sauvage rend d'autant plus forte la violence de l'histoire.

My absolute darling est un roman qui se lit avec une boule d'appréhension tout du long. Gabriel Tallent a insufflé dans chaque page une tension dramatique qui se ressent avec force. On est vraiment loin de la lecture détente!
J'en suis ressortie comme étourdie par un uppercut, heureuse d'être parvenue au bout des 450 et quelques pages afin de pouvoir souffler et me remettre des émotions violentes que le roman m'a données. Il y a une fascination oppressante qui s'exerce au rythme des chapitres. Et comment ne pas ressentir d'empathie et de compassion pour ce magnifique personnage de Turtle, confrontée à la folie du père? Même si la nature et les manifestations de cette folie diffèrent, Martin Alveston m'a fait penser plus d'une fois à l'excellent et douloureux Profession du père de Sorj Chalandon.

Dur, rude, prenant et noir, tel est My absolute darling. Au-delà de ces qualificatifs, il est également un grand roman qui ne s'oublie pas.
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