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Critique de 5Arabella


Il est très difficile de résumer, de raconter ce livre. Il a paru en deux volumes distincts au Portugal, « La Femme sans tête et l'Homme au mauvais oeil » en 2017, puis « Cinq enfants, cinq souris » en 2018. L'édition française rassemble les deux textes, qui semblent en effet s'emboîter, certains personnages circulant de l'un à l'autre.

Le livre est composé de chapitres, décomposés en parties, très courts pour certains. C'est une sorte de mosaïque, de jeu de puzzle, de devinette. de labyrinthe peut-être, qui est présent au début du livre, ou de combinatoire, l'auteur étant semble-t-il féru de mathématiques. Des scènes, des images, des personnages, nous occupent quelque temps, jamais très longtemps, dans des situations étranges, incongrues, jamais complètement explicites. L'écriture et un certain nombre d'éléments rappelle l'univers des contes, de celui du Petit Poucet par exemple. Mais la Femme-sans-tête, pour retrouver son chemin dans le labyrinthe, sème non pas des petits cailloux, mais son sang, qui goutte de son cou, sa tête ayant été coupée. Ce sont donc des contes encore plus cruels que les contes que l'on raconte aux enfants.

Mais cet univers des contes, est croisé avec celui de l'histoire, aussi cruelle que l'univers imaginaire des contes. Là aussi les récits font remonter des réminiscence, déclenchent des associations d'idées. Il y a une ou des révolutions, on pense à la Révolution française, mais aussi la russe, il y a d'ailleurs un jeune homme appelé Moscou, la chinoise etc. Et aussi l'histoire des sciences et de la techniques, des machines, en particulier celles destinées à maîtriser les hommes, comme celle conçue pour enlever un morceau dans le crâne des hommes catalogués comme fous, activité à laquelle s'applique ce brave docteur Charcot. Certains de ces hommes ont été rendus fous par les machines, comme ceux qui ont pris le train, dont la vitesse provoque de néfastes effets. La science et l'histoire produisent aussi de récits, des mythologies, pour reprendre le titre du livre, qui obéissent aux même règles que les contes. Et il y en est de même pour la religion, semble suggérer Tavares.

Sous des apparences ludiques, par le biais d'un récit alerte, voire par moments amusant, l'auteur dresse un portrait terrifiant, d'une humanité vivant ses pires cauchemars, qu'elle produit elle-même. le plus terrifiant étant une forme de plaisir, que les personnages du livre semblent éprouver, et auquel le lecteur ne peut échapper, tant Tavares, par son écriture et la manière dont il agence ses contes, nous captive, nous entraîne, nous fait voir des visages monstrueux de l'humanité, dans un sorte de jeu, de ronde infernale, mais qu'il n'est pas possible de quitter, une fois entamée.

C'est du très grand art, quelque chose de magistral, même si terriblement inquiétant.
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