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Critique de Osmanthe


Découverte pour moi du fameux Osamu Tezuka, un des maîtres de la BD japonaise. BD, car l'occidental est ici en terrain familier, on est plus près de tintin que des grandes séries de mangas. Comme dit par ailleurs par d'autres babelionautes plus experts, le trait fait penser au dessin de presse, et le récit en a les qualités de dénonciation et d'humour. Nous sommes en 1967, en période de guerre du Viet-Nâm, de développements de la science, c'est aussi l'ère de la consommation et de la communication de masse qui s'ouvre. En même temps, les horreurs de la seconde guerre mondiale ne sont pas encore si loin derrière. Osamu Tezuka met en scène un personnage moyennement fréquentable, Tenka Taihei : petit, couard, querelleur et pas particulièrement respectueux des femmes, il suscite quand même la sympathie par son côté speed, naïf et victimaire. Il est enrôlé de force par un laboratoire de l'armée qui cherche à développer des super-guerriers du futur, et va être le jouet de deux ministres japonais. Le premier, Kurosumi Ôtomo est chargé de la recherche scientifique. Un test médical est fait sur Tenka, et là, incroyable : ses spermatozoïdes ont deux flagelles ! Avec cette particularité unique, il va être utilisé à outrance pour produire des êtres asexués. Si deux vraies femmes de caractère le convoitent, il ne peut jamais faire son affaire, il faut qu'il passe à la trayeuse !!! Entre engueulades, courses-poursuites, déguisements, fortes femmes, meurtres, l'histoire s'enchaîne sans répit, l'expérience se déploie au Taiheitengoku, une sorte de mini-Etat créé pour ça. Les asexués qui sont des clones issus chaque fois du même père Tenka, peuvent prendre comme bon leur semble à tout moment une apparence d'homme ou de femme. Ils deviennent peu à peu des centaines de miliers, des millions, et vont servir, sur l'idée du Ministre de l'Information de chair à canon pour une émission de divertissement, une boucherie à grand spectacle. D'autres servent d'esclaves sexuelles à de gros magnats de la pègre japonaise. Mais bientôt les asexués vont se rebeller et toute cette ignoble machinerie va se retourner contre ses promoteurs.

Ce livre est un pavé de 430 pages où l'on ne s'ennuie pas, vu le rythme et les rebondissements à l'oeuvre. En reprenant quelques codes du nazisme (le ministre de l'information a des airs de Goebbels et Taihei est utilisé et grimé en Hitler pour haranguer les foules, comme l'illustre la couverture), il capte parfaitement, déjà en 1967, les dangers des progrès de la science, de l'eugénisme. Il résonne avec force aujourd'hui dans un monde où la différenciation entre les sexes se réduit toujours plus, mais aussi entre les humains et les robots. Cela en fait une BD visionnaire, dont le propos bien plus grave qu'il n'y paraît (y compris sur la question des sentiments, quel amour et sexualité possible avec ces êtres nouveaux ?), est traité avec humour, car le personnage de Taihei est assez drôle.

Une lecture divertissante et intelligente !
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