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Citations sur Boys (10)

Mes parents ne s’enthousiasment pour rien, ils ont évacué toute passion de leur quotidien. Je leur connais peu d’amis, peu de sorties, ni les livres ni la musique n’ont de place chez nous, et quand il nous arrive d’aller au cinéma, trois fois dans l’année, c’est toujours pour se taper des navets français.
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la défaite ne vous éloigne pas, c’est une leçon que tu retiens, qui s’inscrit loin, en profondeur, dans chaque cellule, la chaleur est possible même dans la défaite, ta main collée à la sienne comme plus tard tu empoigneras d’autres mains, d’autres épaules, dans ces tribunes où toujours tu retourneras, même après la mort du père, l’année de tes dix-huit ans, de ça je t’ai déjà parlé, le père battu à plates coutures, parti comme ça, sans trop de mots, sans même se plaindre, oui, toujours tu y retourneras, tous les samedis, le cérémonial des marches jusqu’aux gradins, les supporters comme un seul homme, le courant de fraternité entre vous qui ne vous connaissez pas, tu connaissais à peine plus ton père, il t’était étranger, inaccessible, mais il y avait ça, il y a eu ça, et c’est ce que tu pars chercher tout là-haut, dans ton ascension, sous le toit de la tribune Nord, rang 7, toujours le même, où s’envolent les chants et vos cris, un peu d’enfance, un peu de lui, l’odeur du cuir, les battements de son cœur contre toi. 
Enfin voilà… Comme je te disais, j’ai pris deux places pour samedi prochain, et j’aimerais bien qu’on y aille ensemble pour une fois.
Tu dirais oui?
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J'ai aimé nos instants minuscules, nos instants de rien, ce que l'on croit être l'ennui, le quotidien, mais qui n'est autre que la manifestation sincère de l'amour, son expression nue et désintéressée. L'amour n'existe que là, dans ces intervalles dépourvus de consistance.
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Quand je me croisais dans le miroir, j'avais un aperçu de ma gueule dans une vingtaine d'années. 
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Il l'embrasse à nouveau, ses lèvres flattent son cou, des lèvres prudentes, qui retiennent leur élan, car il faut y aller, l'heure du dîner approche, et les retards sont peu appréciés; ce soir à la maison de retraite l'Air du temps, on sert des poireaux vinaigrette suivis d'une blanquette de poissons.
Elle déteste les poireaux, Léon a une sainte horreur du poisson en sauce. Ils se sont déjà mis d'accord; comme hier, ils échangeront leurs plats.
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"la victoire vous avait liés, la défaite ne vous éloigne pas,"

"La petite boîte d'ampoules translucides a pris place dans le frigidaire à côté des canettes de bière et des pots de yaourt. Cette intrusion, c'est le pire des aphrodisiaques. Les ampoules, les piqures, les courbes de températures forment un foutu nuage toxique dans sa tête : la baise sur ordonnance, Samuel n'en peut plus."

"Notre relation avait beau être récente, il y avait entre nous une telle évidence..."

"il y a la vie, la vie, tout connement, avec ses joies fugaces et ses grandes contrariétés, ses emballements et ses empêchements, la vie avec ou sans enfants, et que chacun se débrouille avec les cartes dont il dispose ; à quoi bon demander ce qu'il serait advenu avec un jeu différent ?"
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D’accord, d’accord, avant que tu répondes je veux bien t’expliquer, je veux bien essayer, je vais tâcher de te dire pourquoi ton mec est à moitié cinglé avec tout ça, pourquoi souvent ça prend des proportions pas raisonnables, pourquoi il n’y a jamais ni resto, ni ciné, ni bouffe avec les amis, rien d’autre le samedi soir, pourquoi je suis comme ça, pourquoi par exemple je considère Greg Moulin, notre attaquant, une légende, comme un frère, un membre à part entière de la famille, je veux bien, je veux bien essayer, mais d’abord ferme les yeux, ferme, voilà, comme ça, et maintenant représente-toi une scène, une scène démesurée, à ciel ouvert, écrasée de lumière, plus de lumière qu’il n’en existe, plus de lumière que tu n’en as jamais vu, il en tombe de partout, de partout, et tout autour, découpant la scène dans une géométrie à l’équerre, imagine la pénombre des tribunes, les tribunes plongées dans le noir, dans le noir et dans le bruit, un bruit tel qu’il t’arrache le ventre, avec des chants à l’unisson, des refrains martelés en chœur, à la respiration près, imagine les cris, les hurlements, la gorge aride à force de tirer sur les cordes vocales pour te faire entendre, pour mêler ta voix aux autres voix, tresser tes cris aux autres cris, tes chants aux autres chants, imagine les chants pareils à un torrent qui enfle et t’avale tout entier, imagine cette clameur, le grondement qui bat à tes oreilles, et toi qui ajoutes ta voix, toi qui te débats dans ce vacarme, mais ta voix à toi c’est celle d’un garçon de neuf ans, ta voix elle ne porte pas, le souffle est vain, l’effort stérile, pourtant tu cries, tu cries quand même, et tu chantes, tu chantes quand même, comme les autres, avec les autres, et tu applaudis à t’en faire mal, ça oui, qu’est-ce que tu applaudis, à la fin, quand tu remontes en voiture avec le père, tes mains rougies se rappellent à toi, et alors le père, absorbé par le trafic, t’observe à la dérobée dans le rétroviseur, enfoncé dans la banquette arrière tu le vois esquisser un sourire, son profil éclairé par le pinceau stroboscopique des phares en sens inverse, il te demande si ça t’a plu, « Ça t’a plu, Hatem ? », et tu manques de voix, tu manques de mots pour lui répondre, les verbes te font défaut, les adjectifs, la panoplie pour décrire ce qui s’est produit, difficile de nommer le frisson qui longtemps après hérisse encore tes rares poils...
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Au restaurant, une table modeste de l’avenue Poincaré où Claire et son conjoint avaient leurs habitudes, Cécile a insisté pour m’avoir à ses côtés. J’ai tiré une chaise à sa gauche, Anaïs a pris celle de droite. Sa garde rapprochée à nouveau réunie. J’ai tout de suite reconnu le fils d’Anaïs, qui devait avoir huit ans la dernière fois que je l’avais vu. De part et d’autre de la table, je retrouvais cette galerie de portraits qui avaient formé ma famille.
J’ai beaucoup bu, Cécile aussi. Les verres que l’on remplissait colmataient les moments de gêne entre nous. Je ne sais pas comment mais, une fois les plats débarrassés, je lui ai proposé d’aller en prendre un dernier.
— Chez toi, dans ce cas.
Sans plus de mots on s’est retrouvés dans ma voiture.
Je lui ai fait visiter l’appartement que je louais depuis notre séparation, on s’est repliés au séjour. J’ai sorti de l’armoire la bouteille de mirabelle. L’alcool aidant, Cécile s’est délestée. De cette journée, de sa douleur, du fardeau d’angoisses qu’en tirant leur révérence les morts abandonnent aux vivants.
Elle a jugé plus raisonnable de terminer la nuit ici.
Mon café était froid à présent. J’ai vidé la tasse au fond de l’évier, j’en ai préparé une autre pour Cécile, si elle se levait. La migraine insistait. J’ai avalé deux aspirines, après quoi je n’envisageais qu’une longue douche pour me requinquer. Je me suis déshabillé. L’eau brûlante m’a à peine apaisé.
Je pensais à elle. À la nuit passée ensemble. À la manière qu’elle avait eue de tomber dans l’abîme sitôt après, blottie en chien de fusil, ainsi que je l’avais vue faire pendant douze ans. Je pensais à sa peau, à l’infinité de grains de beauté qui constellent son dos comme ses épaules et sur lesquels, refusant le sommeil, j’avais promené mes doigts, comme autrefois. Je pensais à son odeur. Cécile ne tolérait aucun parfum, elle refusait d’en porter, son odeur n’appartenait qu’à elle. Tatouée dans ma mémoire, je la reconnaîtrais parmi des multitudes.
Cette nuit, j’avais replongé. 
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INCIPIT
Antoine
Il était tôt, la clarté du matin hésitait derrière les persiennes. J’ai roulé hors du lit, j’ai quitté la chambre à tâtons. Cécile dormait encore. Au salon la fenêtre était restée entrebâillée, le froid dans la pièce m’a piqué au menton direct. J’ai réuni mon pantalon et un pull perdus sur le canapé, j’ai allumé ma première cigarette, ouvert les battants.
Songeur, je suis resté plusieurs minutes à observer le renflement sombre des nuages, le ciel apprêté pour la pluie. Plus bas, un camion d’entretien décapait le trottoir à grande eau, deux balayeurs trimaient au-devant de l’engin pour débarrasser la rue des reliefs de la veille. J’habitais un quartier animé du centre-ville et on était samedi. Les cadavres de canettes inauguraient le week-end.
J’ai rejoint la cuisine sur injonction du chat, l’animal se frottait dans mes jambes avec insistance en exigeant son dû. Je me suis occupé des croquettes et de l’eau fraîche tout en tendant l’oreille en direction de la chambre. Aucun son, aucun mouvement. Cécile n’avait jamais été une lève-tôt. J’ai inséré une capsule dans la machine Nespresso, attendu que la tasse se remplisse. Mal de crâne, une douleur sourde matraquait mes tempes. Avec l’âge je supporte moins bien l’alcool. Mentalement, j’ai dressé le bilan de la soirée. Bières, vin, vodka ; et là-dessus la mirabelle de mon père que je réserve aux grandes occasions. Celle-ci en était une, malgré les circonstances.
Avec Cécile, on ne s’était pas revus depuis sept ans.
J’avais longuement hésité avant de me décider.
C’est Guillaume, notre dernier ami commun, qui m’avait dit pour Claire, la mère de Cécile : « AVC. Tombée chez elle, dans la cuisine. Elle a été conduite à l’hôpital, mais les médecins n’avaient aucun espoir… L’enterrement est prévu le 12. »
D’apprendre sa mort, ça m’avait miné. J’avais toujours nourri de l’affection pour Claire et cette estime était réciproque. Du jour où j’avais été présenté, elle m’avait considéré comme le fils qu’elle n’avait jamais eu. Le fils dont un temps elle avait rêvé avant de se ranger à l’avis de son mari d’alors : deux filles, c’est déjà bien. Je conservais le souvenir d’une femme avenante, optimiste, sourire doux, opinions tranchées qui lui valaient au barreau une réputation d’avocate inflexible. Et puis je songeais à Cécile. Au chagrin qui devait la labourer. Qu’on se fût déchirés à guerre ouverte en divorçant n’y changeait rien. Elle avait été mon grand amour. Le seul. Et elle le demeurait. Sept ans après, c’était absurde, tragique par certains aspects ; mais qu’y pouvais-je ?
En fin de compte, j’ai assisté aux obsèques.
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C'est amusant combien à force de se côtoyer un couple peut se passer de paroles.
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