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Critique de colimasson


Jésus finira par triompher ! (ne fermez pas la porte, on ne fait pas partie des Témoins de Jéhovah.)
Jésus s'est résigné à faire deux-trois concessions pour que son message traverse les millénaires au-delà des pouvoirs temporels. Il savait qu'il faut parfois faire figure basse en attendant que son heure arrive. C'est la raison pour laquelle Jésus n'a pas confié le dépôt de son message à ses meilleurs potes : Jean, qui était son plus grand fan, n'aurait pas permis au message de sortir du cercle de ses admirateurs et Marie de Magala, en tant que femelle, n'avait strictement aucun crédit. Alors Jésus a choisi de confier cette mission à Pierre, le plus borné de ses disciples, celui qui traînait avec lui sans trop savoir pourquoi ; mais il était aussi « le meilleur administrateur, rendu d'autant plus zélé dans la perpétuation du culte de Jésus qu'il se sentait coupable de l'avoir renié par trois fois ». Jésus était malin : il n'écoutait pas les penchants de son coeur et savait reconnaître les qualités de ses employés au-delà de leurs différents idéologiques. de plus, Jésus avait foi en l'humanité et il savait que, même si son message serait un peu transformé par les pouvoirs temporels au fil des siècles, soumis au grabuge du temps qui passe, il serait possible aux coeurs purs de le retrouver dans sa forme originelle par l'intuition spirituelle. « le but était que, par une suite presque ininterrompue de falsifications, de réfutations et de dénonciations, l'accès au coeur de sa parole ne soit jamais perdu ».

Pacôme affirme que le coeur de ce message a été préservé hors des cercles du pouvoir par les sectes gnostiques, par les hérétiques (Pacôme cite notamment les cathares qui bénéficient d'une aura dramaturgique sans équivalent puisqu'ils se laissèrent buter par les soldats du Roi, suivant leur principe de reniement du monde dans un fuck généralisé), dans le soufisme sunnite etc. Cette connaissance originelle faillit renaître au cours de la Renaissance hermétiste mais le siècle des Lumières advint, qui n'alluma que les Lumières des futurs supermarchés en germe dans l'esprit matérialiste à venir. « le capitalisme n'est rien d'autre que la continuation de l'Eglise par d'autres moyens : un permanent « millénaire » où un groupe d'élus se réjouit dans un Paradis à l'image de sa sordide mesquinerie, en observant ses victimes, les « damnés de la terre », souffrir dans une plainte continuelle. »

Le romantisme qui advint ensuite est comme une sorte de longue plainte mélancolique chantant l'éloignement croissant de l'homme d'avec l'essence du message gnostique. Les hommes de lettres de cette époque semblent devoir se crucifier sans cesse pour rappeler que ce monde est faux, mais sans véritable succès puisque la complaisance dans la souffrance continue de falsifier le message christique. C'est après ces années d'ébullition romantique que les manuscrits de Nag Hammadi furent découverts. Pour Pacôme, ce n'est pas un hasard : les textes apocryphes contenus dans ces jarres furent comme un brûlant rappel du message originel contre le dogmatisme canonique chrétien récemment mué en capitalisme. C'est comme si, voyant que les humains n'allaient finalement pas réussir à conserver vivant le message christique, l'univers s'était dit : c'est le bon moment pour leur balancer ça à la gueule. « L'objectif de la Bibliothèque de Nag Hammadi, c'est de nous aider à en finir avec notre servitude sentimentale par une alliance nouvelle entre l'amour et la solitude et avec nos hontes esthétiques par une sacralisation libre de l'imagination à travers l'exégèse sacrée. L'objectif de la Bibliothèque de Nag Hammadi c'est de nous aider à en finir avec notre timidité politique par le rappel de nos victoires récentes, invisibles mais bien réelles, contre les puissances spirituelles et matérielles qui n'ont cessé de nous opprimer. »

Les manuscrits de Nag Hammadi constituent notre défense contre le règne du capitalisme, plus destructeur encore que tous les autres règnes précédents. Ils sont l'occasion de prendre conscience que « nous souffrons dans un esclavage intérieur bien plus tordu encore que ce que nous imaginions ». le capitalisme comme religion déplace la coercition de l'extérieur vers l'intérieur et transforme les relations spontanées en relations d'utilitarisme ou en instrument d'autodestruction. le chapitre de la « Sofia amoureuse » est l'un de plus beaux et des plus puissants de ce livre.

La conclusion, comme d'habitude avec Pacôme, se déroule dans la célébration de la culture populaire comme lieu de retrouvaille de la populace avec l'essence du message gnostique. Si je ne suis pas insensible à l'art du divertissement et à l'esthétisme numérique, je ne dirais pas pour autant que c'est le moyen le plus pertinent de retrouver notre nature divine. La tête d'un mec regardant la télé est le signe le plus évident de la décadence. Retrouver le sens de la relation avec autrui me semble plus juste. L'univers nous enverra peut-être la bénédiction de l'arrêt de toutes les centrales nucléaires du monde pour nous retrouver les uns avec les autres ? J'espère que ça n'arrivera pas à mon époque.

Bonne soirée téloche les amis.
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