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Citations sur Les Maisons vides (26)

La Jacquie des grands principes, celle qui lui a relevé le menton en appuyant de tout son poids pour allonger son écart, la Jacquie des oui-ça-fait-mal-mais-tu-peux-le-faire, des fais-comme-si-c’était-facile, des ce-qui-se-passe-à-la-maison-reste-à-la-maison-et-ce-qui-se-passe-à-l’entraînement-reste-à-l’entraînement, son entraîneur chérie et intransigeante, la Jacquie de toujours la somme désormais d’exprimer sa souffrance. Pire, de vouloir la résoudre. C’est inconcevable.
Gabrielle a l’âge où l’on ignore les frontières de soi. Elle croit encore, et pour plusieurs années, qu’il suffit d’un effort de volonté pour être indestructible.
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Quand Suzanne retrouve une sorte d’équilibre des fluides, l’hôpital lui autorise la sortie – pour Gabrielle, il faut attendre. La mère réintègre son domaine, maison étrangère, maison silencieuse qui lui rappelle son ventre vide et cette enfant qui se débat, ailleurs. Elle s’empresse de fuir. Débutent alors les allers-retours quotidiens sur la route de l’hôpital. Le temps que dure l’hospitalisation de Gabrielle, Peyo, puis Suzanne avec lui, observent les maïs pousser.
Au moment de l’accouchement, les semis s’élèvent de quelques centimètres ; à la sortie de la pédiatrie, trois mois plus tard, les plants d’un vert ciré, avec leur fleur mâle dressée comme une plume d’Apache, auront atteint un mètre soixante et seront prêts à être castrés. Entretemps, les parents apprennent par cœur le trajet vers le sud, ils constatent chaque jour davantage la fonte des neiges et l’avancée du printemps. Parfois, lorsque le ciel est voilé, les montagnes paraissent s’évanouir. D’autres jours, elles se détachent du ciel, scintillantes, si nettement qu’on les croirait accessibles à pied.
Suzanne en devient superstitieuse. Maintenant, elle fait des paris sur l’état de santé de Gabrielle selon la netteté de l’horizon. Montagnes invisibles : Gabrielle a des difficultés respiratoires. Ciel dégagé, montagnes claires : Gabrielle a un problème de température. Maigres nuages accrochés aux sommets : Gabrielle a des soucis cardiaques.
Car Gabrielle – ma Gabrielle sauvage et bagarreuse, fine comme un bébé sirène – n’est pas encore sauvée. Elle court le risque d’être aveugle, ou stupide. Elle se bat pour respirer, elle se bat pour manger, elle se bat pour grandir.

Je crois que le rapport à la douleur de Gabrielle se forge là, dans ces premiers jours où elle s’emploie à vivre avec son corps en avance. Pas complètement mûre pour la vie à l’air libre, Gabrielle apprend en urgence à oublier les eaux placentaires ; elle découvre la résistance sans en avoir les armes. Je me demande quel genre d’entêtement, quelle sorte d’effronterie on acquiert en commençant ainsi à vivre.
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La stèle a été gravée au nom de la María. Entre parenthèses, deux dates : celles de la naissance en Espagne quatre-vingt-treize ans plus tôt, et la date d’avant-hier. Gabrielle reste debout sous la pluie, avant d’oser s’asseoir.
Nous y sommes : ma Gabrielle aux mains brûlées, penchée au-dessus d’une dépouille, ma Gabrielle de marbre, assise sur une tombe. Le front appuyé contre la stèle, Gabrielle comprend que, chaque soir, il lui faudra revenir.
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Elle vient de découvrir la mort, elle l’a tenue entre ses mains, s’y est brûlé les paumes, mais Gabrielle pas un instant ne croit en autre chose que sa propre éternité.
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Il est minuit passé. Gabrielle a treize ans et elle vient de perdre le sommeil.
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Incipit :
Par une nuit aux étoiles claires, Gabrielle court à travers champs. Elle court, je crois, sans penser ni faiblir, court vers la ferme, la chambre, le lit, s’élance minuscule dans un labyrinthe de maïs, poussée par le besoin soudain de voir, d’être sûre.
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