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Critique de brigittelascombe


Je mange donc je suis prône le psychiatre Apfeldorfer.
Irina Sasson, l'héroïne centenaire de Joëlle Piolat, pourrait affirmer Je mange donc je vis, car son gâteau café-café est intimement lié à chaque moment d' intense émotion de sa vie, il est sa vie et la maintient en vie tant qu'elle se souvient de tous les ingrédients.
Ses souvenirs alternent avec le présent et le passé de sa petite fille Susan, à ses côtés, mais ignorante de ces connexions subtiles.
Contrairement au livre A l'étouffée dans lequel Claire Blanchard brasse plusieurs recettes,il n'y en a ici qu'une seule.Mais elle est unique offerte par une cousine à l'occasion du mariage d'Irina et personnalisée par la suite.
Le talent de l'auteur est de partir d'un premier mot et d'enclencher grâce à lui un évènement, unique aussi.
Le cadeau de noces se relie à l'arrangement premier, au désir,au plaisir et à la connivence avec Adriano, l'inconnu, directeur de la Compagnie qui achète des pierres dans des concessions minières mais il relie également Irina aux siens puisqu'elle quitte tout pour suivre son nouvel époux à Batenda.
Et si je remplaçais la crème à la vanille par du café? s'interroge-t elle.
"Manos fendichas!" "Fine pâtissière!"
Le beurre normand c'est bien meilleur.Qu'à celà ne tienne, en voilà!
Les corps qui s'accordent sur un même tempo, quel bonheur!
Sept cuillères de sucre en poudre.
Prémisces de grossesse.Et la libération là bas à Paris.
Trois jaunes d'oeufs.
L'enfant palpite.
De la poudre vanillée.
Premières contractions.
Une tasse à café de moka pour la crème.
Naissance de Djoïa.
Mélanger le beurre.
Adriano lui offre un piano mais se déplace souvent et s'emporte, fantasque. Premières fausses notes.
Et ainsi de suite jusqu'au jour où, erreur fatale de femme qui trompe et se trompe, elle sale au lieu de sucrer.
Fureur,jalousie,lectures,solitude,mésentente,maladie d'enfant,amour maternel,réconciliation,veuvage,départ. Et autant de gâteaux café-café!
Un livre d'une rare poésie, à déguster en écoutant monter crescendo la rumeur du fleuve, en s'imprégnant de la sagesse d'une vielle indienne pour que la lune emplisse la chambre de l'accouchée au travail laborieux, en respirant l'odeur amère des grands "quaolqinos",en admirant l'envol des "caïcarinhas" aux battements d'ailes lents et veloutés, en ressentant le vertige sensuel des corps soumis à l'attrait de l'interdit.
Un livre au charme exotique, pétri d'émotions, d'une auteur que je ne connaissais pas et que je vais m'empresser de connaitre plus amplement en lisant d'éventuelles autres publications.

(Autre critique du même livre : Le bonheur est affaire de goût, mais la vie n'est pas toujours goûteuse, alors Irina a composé sa propre musique, avec ses propres ingrédients pour composer un gâteau café-café sublime et des occasions somptueuses de le déguster.
De réussite en réussite, une seule fausse note,celle de l'amant, mais sans sel et sans vertige, la vie vaudrait-elle la peine d'être vécue? Conciliation de femme réconciliée qui à travers sa recette unique part sur les traces de son passé, tandis que sa mémoire centenaire s'effiloche tout doucement, et que sa petite fille remonte elle aussi le temps à ses côtés.)
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