Petit traité de l'amitié

Et si l'amitié s'articulait autour de Dieu ? « Aimez-vous les uns les autres » : après tout, n'est-ce pas ainsi que sont posées les bases du kérygme dans la Bible. Certes, il y a l'amour, que tout un chacun connaît ; cet amour quasi institutionnel, expression même du bonheur auquel force est de prétendre. Mais de l'amitié – là où les Anglais font le distinguo entre like et love – qu'en est-il, sinon qu'à cette croisée des chemins l'autre s'oblige à nous ?
Donner et recevoir, partager la grande Cène de l'amitié suprême, aller comme attiré vers celui ou vers celle qui n'adopte pas forcément nos codes ̶ pour preuve Jésus acceptant lui-même de partager le repas des Pharisiens ̶, en témoignant de cela, l'ami véritable devient ni plus ni moins que le témoin de sa propre vie. « Mourir sans amis, c'est mourir sans témoins », nous dit le proverbe. Mais plus encore, l'amitié devient la théophanie par laquelle nous entrons en l'autre, c'est-à-dire en celui ou en celle de tous ces Jésus Christ que nous sommes appelés à côtoyer, que nous côtoyons déjà. L'amitié d'un Vendredi de Terra Incognita, qui n'aspire à cela ? Cet ami que l'on sanctifie sans rien savoir de la sainteté, « parce que c'était lui, parce que c'était moi », disait Montaigne parlant de la Boétie. Parce qu'il y a du divin en lui, comme une grâce qui aplanit toute imperfection ; la reconnaît mais s'en détache, passe outre. Même dans le silence, même dans le respect de la solitude de l'autre, l'ami se trouve, plus confident que jamais. Et puis simplement s'en remettre à Dieu pour l'ami de toujours, quoi qu'il arrive.
Petit traité de l'amitié de José Tolentino Mendonça, prêtre, nous convie à un sacré voyage. Pari osé, pari réussi !
Merci Masse critique de m'avoir proposé ce merveilleux livre.