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Critique de Osmanthe


N'ayant jamais vu l'illustre film qui en a été tiré, je me suis plongé sans a priori dans ce court roman de Su Tong...Et c'est une belle surprise. L'auteur réussit à faire revivre avec maestria les moeurs et rites de Cour, encore bien archaïques, de la Chine des années 1920. On devine un grand réalisme, avec une trame et un développement conduits avec subtilité et un certain suspense sur le dénouement. Il ne sombre jamais dans le pathos, ou la facilité d'un scénario romanesque à l'eau de rose. L'écriture est de qualité, fluide, les dialogues nous montrent bien le caractère des personnages, qui sont bien typés sur le plan psychologique. J'ai trouvé certains passages particulièrement beaux, comportant des images très poétiques.

Nous voici donc immergés à la Cour du Maître Chen Zuoqian et de ses quatre épouses, dans l'ordre Yuru, Zhuoyun, Meishan, et Songlian. L'auteur va nous raconter les intrigues, jalousies et rivalités entre ces femmes et leurs relations avec le Maître, sous l'angle du point de vue de Songlian.
Les autres épouses ont donné au Maître un ou deux enfants chacune, enfants qui sont aussi de la partie dans ces bisbilles, par leurs chamailleries, leur arrogance, mensonges ou indiscrétion. Si Yuru est un peu "défraîchie" et terne, Meishan est indomptable et fricote en douce avec le médecin de famille, et Zhuoyun qui pourrait bien être la plus épanouie et favorite, mais peut-être aussi la plus vénéneuse...
Notre héroïne est la plus jeune, 19 ans, et très belle. Mais l'auteur réussit à en faire un portrait très complexe et nuancé. Elle est pétrie de contradictions. Douce et rêveuse, pleurant facilement parfois...peut-être trop pour que ce soit sincère, quand elle semble se plaire assez vite à utiliser les armes de ses concurrentes : colère, bouderies, victimisation, cruauté...
Songlian s'ennuie, le Maître vieillit et rencontre quelques problèmes de virilité qui perturbent la vie sexuelle de ces femmes...et leur donne aussi une forme de pouvoir sur lui, qui malgré ses colères récurrentes ne tranche pas spécialement et dépend lui-même de ses dames. Songlian, elle, ne tarde pas à avoir de multiples problèmes psychologiques à régler : si elle est censée donner un enfant au Maître, elle a aussi au fond d'elle ce rêve de devenir mère, rêve qu'elle sent s'éloigner...à moins que le fils de Yuru, Feipu, qui est davantage de sa génération, ne provoque en elle quelques émois...
Mais l'environnement est décidément redoutable, entre sa servante Yan'Er qui ne l'aime pas et veut manifestement sa mort, et cet inquiétant puits dans les jardins du Palais dont on dit qu'il a vu des concubines y être noyées des années auparavant...faute d'être restées fidèles au vieux Maître. Songlian ne tarde pas à avoir des angoisses et mélancolies...

Un roman qui se lit avec un réel plaisir et nous fait découvrir le sort de la femme chinoise, finalement pas si différent des cours royales européennes, à ceci près que ces moeurs étaient encore en usage il n'y a finalement pas si longtemps !
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