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Critique de gerardmuller


Les tendres ménages/Paul-Jean Toulet (1867-1920)

« Sylvère Noël de Ribes avait, entre autres choses, apporté en dot au baron de Mariolles-Sainte-Mary, son récent époux, un bien assez vaste, mi-château, mi-ferme, sis à l'ombre des Pyrénées, parmi des arbres noirs, des sources brusques et froides. »
Ainsi commence ce court roman très particulier au style brillant et pétillant, mettant en scène le banal de la vie conjugale mais avec des personnages hors du commun, bien campés et que l'on a l'impression d'avoir toujours connus.
...Sylvère est une jeune mariée mince, grande et svelte ; elle a la trentaine. Son mari, le fringant baron Mariolles Sainte-Mary, encore bel homme, veut emmener son épouse dans un tourbillon, dans une vie selon trois instincts, boire, jouer et embrasser, la triple noblesse de l'homme.
le jeune couple d'aristocrates part donc en voyage de noces vers Biarritz et rencontrent dans le train des amis du baron, Imogène Harryfellow comtesse de San Buscar d'origine américaine, une femme totalement excentrique, et son mari le comte Cristobal San Buscar richissime mexicain. Peu à peu et insidieusement Sylvère et Mariolles se laissent embarquer dans une folle bringue par ce couple d'amis. Imogène va alors prendre un plaisir pervers à plonger les deux jeunes mariés dans le monde de l'adultère. Imogène a décidé de jeter son dévolu sur Mariolles suscitant aussitôt la jalousie de Sylvère bien jeune et innocente.
Après quelques jours de fête à Biarritz, c'est le départ pour la capitale, les grands hôtels, la tournée des duchesses et balades en victoria. On découvre un Paris de noctambules avec ses lieux de débauches et d'ivresse que l'auteur connaît bien. Imogène conquiert Mariolles sous le nez de Sylvère qui écrit à sa mère pour lui demander conseil quant à la conduite à tenir, La lettre réponse quelque peu cynique de sa mère n'est pas faite pour rassurer Sylvère. Un passage d'anthologie du roman :
« Mais veux-tu que je te dise le grand secret du mariage ? C'est que la tendresse des époux n'y est qu'un moyen passager , quelque chose comme le luxe et les fleurs du vestibule chez les gens qui reçoivent ; et , pour les femmes , au moins , le seul bonheur solide , tout ce qui rend la vie de ménage douce et sacrée , ce n'est pas le mari , c'est l'enfant. »
Cependant se reprenant un peu, Sylvère décide de faire procéder au constat d'adultère devant un commissaire de police et le comte Cristobal lui-même. Un moment narré avec un humour décapant !
Par la suite et pour corser l'ambiance, on découvre qu'Imogène a un frère Lord Gédéon Harryfellow avec qui elle entretient une liaison incestueuse. Et Sylvère résistera-t-elle à l'Ange gardien, ce jeune policier aigrefin chargé de l'enquête qui tente de la séduire ?
Les « tendres ménages » est une perle d'humour et de style. Un vaudeville littéraire qui va plus loin que le marivaudage. Et si le sujet en reste un tant soit peu banal, le traitement qu en fait l'auteur sublime la chose littéraire.
Extrait : « C'est ridicule de danser avec son mari, n'est - ce pas ? C'est comme si on flirtait avec lui . Dans tous les plaisirs il faut un peu de mystère . » (dixit Imogène)
« L'ombre des cloîtres est le seul abri où ne se froisse pas le pauvre rêve des femmes. » (Lettre de Sylvère à sa mère)

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