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Critique de Emiliec28


En quelques lignes j'ai plongé. L'autrice sait s'adresser au lecteur et démontre ses propos avec conviction et simplicité.
Elle met des mots corrects sur des choses qui provoquent parfois des émotions difficiles à verbaliser, en tout cas pour les gens comme moi qui ont du mal à canaliser.
Colère, frustration, sentiment d'injustice, d'incompréhension, ce livre est une mine d'arguments (synthèse de nombreux travaux) quand on se lance dans un débat.

La suite correspond à ma prise de note habituelle :
Elle fait la distinction entre masculinité et virilité :
* La virilité est un attribut "Idéal de performance, d'autorité, de dépassement de soi et d'endurance qui trouve son expression à travers les démonstrations corporelles et/ou verbales" en somme, la virilité se définit par elle-même et les femmes peuvent l'être aussi (virile)
* La masculinité en revanche, ne se définit que par son opposition à la féminité. Dès lors que l'on pense "êtres vivants" elles disparaissent, c'est donc une construction sociale, culturelle et historique.

Elle évoque la construction genrée des individus dès la naissance : par le prénom, un code couleur, des réactions, des adjectifs. En soi, on pourrait se demander où est le problème si ce n'était que "à la différenciation des genres se superpose une hiérarchisation : "être un garçon", ce 'est pas juste "ne pas être une fille" : c'est être "mieux" qu'une fille"
Cette hiérarchisation se voit à travers les activités, les valeurs (émotions, raisons...), le langage (à noter qu' "autrice" existe depuis des siècles, c'est le français qui a été masculinisé, cf également les accords de proximité)

Des études comportementales à l'écoles ont démontré que les garçons sont davantage stimulés, on valorise des qualités différentes : intelligence et originalité pour les garçons, sérieux et propreté pour les filles.

Longue explication sur le fait qu'il n'existe pas de genre "naturel"

Elle aborde le fameux argument physiologique (j'ai tout de suite pensé à notre ami Kaufmann, de sinistre mémoire), elle démonte très bien l'argument mais oublie de préciser que les femmes éjaculent aussi.
Elle démontre également que la science ne peut pas être utilisé comme un argument parce que la science constate, elle ne dit pas ce qui est mieux ou moins bien, ça, ça relève de notre interprétation.

Je suis page 46 et il me parait évident que je ne pourrais pas tout prendre en note, tout est trop intéressant, indispensable même pour comprendre les tenants et les aboutissants de ce militantisme et tenir un échange avec des masculinistes.

Elle parle d'ailleurs de la crise de la masculinité (p.47 & 48 à lire et relire)
81% des victimes d'homicides sont des hommes
90% des auteurs sont des hommes
Conclusion : le masculinisme tue les hommes aussi bien que les femmes.
92% des conducteurs impliqués dans des accidents mortels avec taux d'alcool positif sont des hommes

P.54 présentation des différentes masculinités : hégémoniques ; complices ; subordonnées ; marginalisées

Les privilèges à vivre dans un monde d'homme : (petit échantillon d'arguments)
* La clim, automatiquement mis pour les hommes, 5°C de moins que ce qu'il faudrait pour les femmes
* Les objets pour les mains d'hommes (téléphones, outils, clavier de piano) 1.2 fois plus grandes que celles des femmes
* En 2011, Siri savait trouver du viagra et des prostituées mais pas les centres d'IVG
* Les voitures : 47% de chances d'être blessées plus sérieusement, 17% de chances supplémentaire de mourir à accident équivalent
* La recherche médicale : les symptômes d'infarctus chez une femme sont différents (nausées, douleurs dorsales), vous le saviez, vous ? Il existe 5 fois plus d'essais pour les troubles érectiles que pour les douleurs des femmes (c'est tout de même 1/7 femmes qui souffre d'endométriose et on n'a toujours pas de solutions ! Il faut 7 à 9 ans pour établir un diagnostic !)

Elle précise pour la première fois (et elle le fera souvent tout le long) que ce n'est pas un complot, les hommes n'agissent pas en pleine conscience mais c'est l'idée de souligner l'importance d'avoir des femmes à tous les niveaux décisionnels pour apporter un autre éclairage.

La rue est conçue, prévue pour eux aussi : sur 65 000 rues de 111 communes, 30% ont des noms de personnalités, 94% sont des hommes. Au total, 2% des rues en France portent le nom d'une femme. Nous n'avons pas d'Histoire, personne à qui nous identifier, voilà ce que nous dit la rue. Et pour la majeur partie des cas, tout est à la gloire du soldat, du sacrifice, des combats (Masculins)
Les statues : des hommes majestueux ou des femmes sexualisées. Ne parlons même pas des pubs où la tête des femmes est parfois coupée : tout est fait pour plaire au "male gaze"
Les infrastructures sportives d'extérieur : toutes destinées aux hommes (reprendre l'étude faite sur les skateparks de Bordeaux p.77)

Dans le monde du travail, le schéma se répète, le bon travailleur, celui qui obtient les augmentations, c'est celui qui ne compte pas son temps, n'a pas d'imprévus, pas d'enfants quoi : syndrome de l'épouse formidable. Et à comportement égal, c'est à dire quand la femme imite l'homme ou inversement, la réaction n'est pas la même (p.90) + principe du "boy's club" p.95
Le harcèlement sexuel au travail : 93% des plaintes sont classées sans suite ou ne donnent pas lieu à une condamnation. Elle donne des pistes AUX HOMMES pour changer la donne et ça change un peu, il s'agit de leur combat aussi.

Elle compare judicieusement le harcèlement de rue et le comportement des hommes au travail : il s'agit du même regard porté sur les femmes, objet de désir, sexualisation, condescendance... mais deux castes d'hommes différentes. On s'en prend à la première et on laisse faire les seconds, qui s'offusquent du comportement des premiers. Normal.

La question domestique est également abordée : comment les femmes en sont venues à gérer les tâches domestiques dans les faits et dans l'imaginaire collectif ?
La question de la charge émotionnelle est très intéressante. J'ai souvent considéré qu'on bridait les hommes et que ça expliquait leur difficulté à exprimer leurs émotions.
Mais l'autrice remarque qu'il y a des émotions qu'ils savent très bien exprimer, ce n'est que ce qui est de l'ordre sentimental qui est compliqué parce que c'est censé être le "domaine des filles" et, comme pour les tâches domestiques, c'est dévalorisé, et pourtant essentiel, mais alors, quelle est la solution ? Pour l'instant, la réponse ne se devine pas vraiment, car dans l'état actuel des choses, les exprimer un peu renforcerait la sollicitude des femmes envers les hommes, elle en sortiraient encore perdante.

La contraception : sujet que je maitrise déjà pour des raisons très personnelles, mais elle le développe très bien et, surtout, elle point le gros problème très français du paternalisme médicale.
Le choix de l'homme quand à une grossesse éventuelle se fait au moment de l'acte, pas après

Le sujet de la soumission est abordée p.150

La violence :
En 2018,
* 121 femmes tuées par leurs conjoints
* 28 hommes tués par leurs compagnes (et la moitié d'entre eux étaient violents avec elles)
Pourquoi "féminicide" et non "drame" ou "crime passionnel" ? Parce qu'on ne tue pas par amour, on tue pour posséder. Parce qu'on considère que la femme nous appartient.

Les viols, c'est 16% des femmes (sur les chiffres CONNUS), 94% des violeurs sont des hommes.
Définition de la "culture du viol" p.159 (et en citation)
On casse les clichés :
* 70% des viols se font sans armes, c'est la sidération qui fait tout le travail
* en Europe, 7% des violeurs condamnés ont une maladie mentale (seulement 7% sur les 1% de condamnation)
* 25 à 43% des hommes admettent avoir perpétré au moins une fois dans leur vie une agression sexuelle ou une pénétration par la contrainte.
* 80% des femmes violées l'ont été par quelqu'un qu'elles connaissaient
(il faut s'accrocher à certains passages du livre là, des témoignages et des chiffres très durs)
* 10 à 15% des victimes seulement portent plainte.

Erotisation de la violence : (porno !) Pourquoi ça fonctionne ? Pourquoi la souffrance et l'humiliation des femmes est-elle excitante ?
18% des français pensent qu'une femme peut prendre du plaisir à être forcée, et ce chiffre a été évalué APRES #metoo : dans le cinéma, la littérature, on retrouve cette idée partout

p.170 stratégie de l'insistance, dire "non" ne changer rien, il n'est pas plus entendu que le reste (exemple du refus à diner en comparaison) + témoignages d'hommes qui admettent voir le "non" comme un challenge
Il existe également les violences graduelles, demander le consentement pour chaque nouvel acte est NORMAL et peut être excitant. le consentement ne dois pas être considéré comme global et définitif dès le début du rapport.
Par quoi peut-on commencer en tant qu'homme ? L'émergence d'un nouveau groupe qui va désavouer ce type de comportement. Et en tant que femme ? Pourquoi pas la violence ? (Cf Despentes)

Comment changer les choses de façon plus globale ?
-> verbaliser les actes sexuels / changer de vocabulaire
-> érotiser différemment à travers les mots, le jeu
-> changer "l'objectif pénétration à tout prix"
-> orienter les hommes vers l'orgasme prostatique


UNE PEPITE ! tout le monde devrait l'avoir dans sa bibliothèque !
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