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Citations sur Philosophy before the Greeks (14)

Ainsi, nous pouvons dire que chez les Mésopotamiens, la fonction d'auteur n'était pas assumée par une, mais par trois personnes. Le créateur original, qui serait considéré comme "l'auteur" aujourd'hui, avait peu d'importance et parfois, était confondu avec un personnage du lointain passé. Le propriétaire du manuscrit avait la charger de collationner les textes et son choix lui donnait toute son importance : Assurbanipal voulait rassembler tout ce qui avait été jamais écrit en Babylonie, tandis que Nabû-zuqup-kêna se contentait d'une sélection opérée parmi les textes reconnus. Et le scribe, qui était souvent aussi le propriétaire, le transmetteur. Une situation surprenante se voit ici : le scribe ne se contentait pas de copier fidèlement le texte, bien que les colophons (signatures et conclusions de tablettes) disent que c'était là son unique rôle.

p. 25
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De manière remarquable, les plus anciens travaux scientifiques babyloniens, et donc les plus anciens au monde, furent lexicographiques : des listes de mots. J'emploie le mot "remarquable" car le caractère extraordinaire de ces travaux semble ignoré, non seulement des spécialistes d'histoire générale de la réflexion linguistique, mais même des assyriologues spécialisés dans l'étude des listes lexicales. Aucune autre civilisation ancienne n'a élaboré de lexicographie au moment même où elle inventait l'écriture, et pendant toute l'antiquité, en dehors de la Babylonie, l'activité lexicographique resta balbutiante... En Egypte, où l'écriture naquit peu après la Mésopotamie, les listes lexicales étaient extrêmement rares et ne furent composées que bien longtemps après l'invention de l'écriture ; l'exemple le plus ancien remonte aux XIX° ou XVIII°s av. J.C... La Grèce ancienne ne développa de lexicographie qu'à l'époque hellénistique, et ce n'est qu'à la fin du I°s av.J.C. que le grammairien romain Marcus Valerius Flaccus composa une liste importante (très mal conservée aujourd'hui)... En Chine, où le système d'écriture partage avec Babylone des caractéristiques communes, les premiers répertoires de mots, l'Erya (maintenant disparue) datent du III°s av. J.C. ou peu après...

Les listes lexicales les plus anciennes venues de Babylonie et parvenues jusqu'à nous n'ont pas cherché à compiler l'intégralité des mots employés à l'écrit, mais certainement vers le début du II°s millénaire av. J.C. les collections lexicales étaient gigantesques et semblent avoir tenté de répertorier tous les mots de la langue sumérienne. Personne n'a tenté de calculer le nombre total des entrées préservées à tel moment de l'histoire de ce corpus. Il y en a probablement des dizaines de milliers, des mots les plus communs et les plus simples, comme "eau" ("a"), jusqu'aux mots composés rares, comme "ki-ta-gneshtu-gnu", "le lobe de mon oreille". De plus, les compilateurs allèrent jusqu'à fabriquer des mots imaginaires sans aucune utilité pratique, qu'on ne retrouve que dans ce type de textes . Cet exercice définit bien la relation babylonienne au langage écrit et à la réalité.

pp. 36-37

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L'anonymat de la science et de l'activité littéraires peut nous désorienter au premier abord, si nous cherchons une histoire traditionnelle de la pensée, mais en fait il nous met dans une position privilégiée : nous n'avons plus besoin de "tuer l'auteur". Il ou elle est déjà "mort". Nous sommes contraints de faire une lecture serrée du texte, puisque l'auteur a disparu. Son statut social, marital, ses préoccupations professionnelles, ses relations avec les grands événements de l'histoire n'ont aucune importance. Même si nous le voulions, nous ne pourrions pas les retrouver. Nous ne pouvons plus céder à la tentation de lire le texte historiquement, d'introduire le genre, la race ou la classe sociale de l'auteur. En tant que lecteurs modernes, nous sommes dans la même situation que les anciens Mésopotamiens : le texte est notre seul guide, et notre tâche est de le comprendre selon ses propres termes et en relation avec d'autres textes.

p. 30
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La théorie babylonienne de la connaissance était empirique dans une certaine mesure -- l'observation était essentielle. Mais elle était aussi profondément enracinée dans une méthode de lecture savante. La réalité devait être lue et interprétée comme si elle était un texte. Tout comme Descartes, les Babyloniens savaient que nos sens peuvent nous tromper et que l'observation seule ne peut fonder la connaissance. Leur façon de trouver la vérité ... reposait sur la lecture comme mode de compréhension. "Je lis, donc je suis" aurait pu être le premier principe de l'épistémologie babylonienne... Toute la philosophie babylonienne reposait sur la polysémie des signes cunéiformes au niveau de leur lecture comme à celui de leur signification. Bien sûr, cette philosophie ne pouvait exister et survivre que dans une culture où le système d'écriture cunéiforme était connu.

p. 10
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