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Critique de Polars_urbains


Avertissement : le livre dans sa version anglaise (The True American, A Folk Fable) a été publié aux Etats-Unis en 1976.

Un conte américain moderne. Ou comment Abe et Dave, tous deux morts tragiquement, l'un victime du racisme des blancs, l'autre d'indigènes qui essayaient de se protéger des mêmes blancs, se retrouvent en Enfer à alimenter les brasiers. Triste destin que de se voir refuser l'accès au Paradis, sauf que le royaume de Satan n'est pas pire que le monde des vivants, surtout pour les Noirs puisque ce sont les Américains blancs qui sont discriminés et que c'est leur frustration qui fait monter les « compteurs de désespoir » ! Abe peut ainsi y rencontrer des gens intéressants, y chanter des negro-spirituals et y forniquer avec des femmes blanches (ce qui provoque une forte montée des compteurs) et même y faire des études, ce qui est une punition car le Malin sait bien que c'est l'éducation qui fait le malheur des hommes.

« Je t'ai déjà dit que le Diable était malin… Eh bien, il a calculé que plus un homme était instruit, sur l'état du monde et le reste, plus sa propension à souffrir était grande. »

Mais comme l'Enfer commence à avoir des problèmes d'accueil avec le début de la seconde guerre mondiale – magnifiquement assimilée à un jeu de poker dans lequel les mises et les relances se font en vies humaines – et que, finalement, le Diable n'est pas un mauvais bougre, il va autoriser Abe et son ami Dave à tenter à nouveau leur chance sur la terre. Les voici donc de retour sur le lieu de leur trépas respectif, avec quelques surprises pour Dave qui constate que les Indiens ont disparu de ce qui est devenu Chicago !

Inutile de dire que rien ne sera facile, surtout pour Abe qui doit faire face à nouveau au racisme et à la ségrégation. Car même si les choses ont commencé timidement à changer dans les années soixante, l'application des lois n'est pas acquise, surtout dans le Sud des Etats-Unis, et les mentalités n'ont pas évolué. En témoigne à la fin du récit l'implication d'Abe dans le mouvement des « Freedom Rides » qui visait à faire constater la ségrégation dans les transports.

Un américain en enfer est un conte populaire iconoclaste et amer sur ce qu'était l'Amérique autour de 1976 et sur ce qu'elle est encore aujourd'hui. Avec son rêve américain fondé sur la réussite personnelle et la recherche du bonheur qui satisfait tout à fait Dave – « Je suis simplement un bon vieil Américain. Un vrai Américain. » – mais qui est gangrené par le racisme et la ségrégation. Un rêve inachevé, finalement, qui rendrait presque vivable l'Enfer pour avoir pris le parti des opprimés contre leurs oppresseurs. Un Enfer qui ne risque guère de désemplir :

« Néanmoins, nous ne devons pas nous reposer sur nos lauriers…. Pour ma part, je suis convaincu que l'homme est un fils de pute né et que le potentiel de malfaisance qui se terre dans son esprit reste encore à explorer. Nous devons le dévoiler et lui mettre le nez dedans. Je pense parler au nom de nous tous, vous et moi, réunis autour de cette table aujourd'hui quand je dis : Viva le Malheur ! »

Un grand bravo aux Editions Wombat pour avoir publié enfin ce livre en français. Merci aux animateurs de Babelio pour leur soutien et leur confiance.
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