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Critique de NewHorizon


Dominique Venner, historien, directeur de la Nouvelle Revue d'Histoire, fut l'auteur de nombreux ouvrages. Connu du grand public après s'être donné la mort au coeur de la cathédrale Notre-Dame de Paris en 2013, il nous a livré ici un plaidoyer en faveur de l'identité des Européens. Pas question ici de glorifier l'Europe de l'Union Européenne, mais une Europe des peuples et des nations. Par les temps qui courent, il est en effet primordial de rappeler ce que sont les Européens, d'où ils viennent et ce qui doit les unir. C'est pour faire face au délitement des identités et des nations ainsi qu'à l'inversion des valeurs traditionnelles que Dominique Venner a écrit ce livre. Ce n'est pas un livre d'histoire à proprement parler, son intention « est de favoriser la libre réflexion du lecteur à travers un foisonnement créateur ». En opposition au nihilisme, l'auteur propose l'enracinement.

L'Europe a été marquée par les indo-européens dont l'organisation trifonctionnelle va se répandre largement (fonction sacrée, militaire et productive) : l'auteur fait le parallèle avec les dieux du panthéon Européen qui sont souvent organisés de la même manière, afin d'instaurer une harmonie nécessaire mais on la retrouve aussi dans l'organisation des institutions. Outre l'organisation tripartite, la langue indo-européenne est à l'origine des langues européennes. Elle sera reprise dans toutes les cultures européennes. Le regard tourné vers le nord, comme les Grecs, ils ont cherché une origine septentrionale : c'est le mythe de l'Hyperborée, « le pays des Dieux ». Venner reprend le terme « Boréens » tout au long de son ouvrage pour indiquer une différence avec l'indo-européeanité, afin de ne pas amalgamer ethnie et langue.

Pour l'historien, l'oeuvre fondatrice, à qui l'on doit tout n'est autre que l'Iliade et l'Odysée d'Homère, poème épique qui insufflera les valeurs européennes, ces textes « sont l'expression grecque de tout l'héritage constitutif du noyau européen ». Les exploits d'Ulysse ou d'Hector incarnaient un héroïsme tragique devant le Destin. L'oeuvre d'Homère a d'ailleurs été à l'origine de nombreux débats en philosophie, discipline profondément européenne elle aussi (reprise par Héraclite, les néo-platoniciens, etc…). L'apport de la culture grecque ne s'arrête pas là : L'Histoire est aussi une invention européenne avec Hérodote, « Père de l'histoire ».

Sans avoir de notion d'appartenance à un ensemble européen, l'identité s'est créée face à l'ennemi extérieur, c'est le cas des Hellènes contre les Perses notamment. Malgré les tensions qui peuvent subsister entre les cités voisines, les Grecs se réclament du « même sang ». La virtù et la dignitas, déjà présentes dans l'oeuvre d'Homère sont des éléments essentiels de l'héritage romain. La rigueur du stoïcisme d'Epictète dont Marc Aurèle est l'un des plus grands représentants le sera aussi.

Puis vient le Moyen Age, qui malgré la nouvelle religion, le christianisme, garde ses racines profondes. La langue, le latin, est empruntée aux Romains et les contes populaires celtiques ne cessent pas. Le christianisme, sans être d'origine européenne, s'inscrit dans la continuité. Les châteaux forts et les cathédrales marqueront tout l'Occident. Ainsi l'imaginaire arthurien, le Roman du Graal, Perceval, seront des éléments indissociables des mentalités européennes (symbolique de l'épée, quête de la sagesse, etc..). C'est aussi le temps de la noblesse d'âme de la chevalerie et de la fascination du combat dans les tournois.

Et le rôle de la femme dans tout ça ? Venner insiste sur les différences fondamentales qui existent entre les hommes et les femmes (fonction émettrice / réceptrice). Ces différences sont à la fois physiques, biologiques, mentales. Aucune misogynie ici : les hommes et les femmes sont complémentaires. Contrairement à la nouvelle vague féministe qui souhaite faire des femmes des hommes, l'auteur revient sur le rôle spécifique de la femme en Europe et l'imaginaire de l'amour courtois au XIIe siècle.

Enfin Dominique Venner revient sur des notions historiographiques. Il réfute la vision linéaire de l'histoire et y voit une histoire cyclique (à l'image du Ragnarök). La notion de décadence est analysée : l'Europe d'aujourd'hui est souvent comparée avec la chute de Rome. Pour l'auteur son manque d'homogénéité ethnique en est l'un des facteurs.

Quelques points sont discutables, notamment sa datation. L'auteur nous donne une date, une borne : « 30 000 ans d'identité ». Il remonte ainsi à la préhistoire où les Hommes nous ont fourni nos premières oeuvres d'art : les gravures et peintures rupestres « spécifiques à l'Europe et à elle seule ». Sur ce point, je reste sceptique, il existe des oeuvres rupestres partout à travers le monde, par exemple en Indonésie (vieilles de 40 000 ans et les représentations animales sont déjà présentes), il est donc difficile d'y voir une préfiguration de l'identité européenne. De même, il défend l'idée du recours à l'uchronie (même s'il n'en fait pas usage dans ce livre) afin d'élargir le champ des possibles, mais quel en est l'impact sur le réel ? Les différents sujets sont parfois expédiés rapidement, mais l'auteur donne des clefs de compréhension et les références à d'autres ouvrages sont nombreuses.

Malgré ces quelques points, il n'en demeure pas moins que c'est un livre d'utilité publique. Les sujets sont tellement nombreux qu'il serait trop long de tous les évoquer (un chapitre est consacré au nihilisme et au saccage de la nature). Forcément, les tenants de la pensée occidentale actuelle, incarnant la négation des identités (sauf celles des autres !), seront choqués d'un tel ouvrage. Il est pourtant inutile de s'insurger, pour Dominique Venner : « Chaque peuple porte une tradition, un royaume intérieur, un murmure des temps anciens et du futur ». Ce livre est toutefois indispensable à quiconque souhaite sortir des sentiers battus et percer le voile de la propagande insufflée quotidiennement. Car si les Européens sont riches dans leur diversité, ils sont les dépositaires d'une « même histoire et d'un même héritage spirituel ». Un ouvrage qui permet de retrouver ses racines, non pas pour s'y terrer, mais pour permettre à l'Homme européen de s'élever en ayant conscience de sa nature profonde et de son identité millénaire.

Ps : étant nouveau sur Babelio et ne connaissant pas la politique du site, j'espère que ma critique ne sera pas censurée. J'imagine qu'un livre sur les traditions des peuples africains ne poserait pas de problème.
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