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Critique de Laurence64


Le vent de l'Histoire balaie les 740 pages de ce roman; un vent de feu et de cendres, le feu de la matière, celui de la violence humaine. le XX° siècle fut mais le XX° siècle ne peut céder si facilement devant le siècle nouveau. Car le XX° siècle, c'est à la fois l'instauration de systèmes politiques broyeurs (nazisme, stalinisme) et la suprématie de la physique quantique, mère de la fission atomique.
Paul Verhaeghen ramasse le siècle en une sphère brûlante, crée en son roman un trou noir dans lequel suffoque le lecteur. La langue, magnifique, avance par métaphores justes, très justes, auréolées par la noirceur de l'Histoire, des histoires. Moi, 740 pages ciselées, ça me fait succomber.
Lorsqu'un bombardement sur Berlin rend l'immeuble vulnérable, qu'à l'approche du feu, l'immeuble s'agite puis se cabre, je m'émeus. Et je m'esbaudis lorsque l'écrivain résume le langage du communisme bureaucratique ainsi: "Les communistes plâtrent génitif sur génitif. Vous écoutez maintenant le président de la délégation du Présidium du Soviet suprême de l'Union des Républiques soviétiques socialistes." On frôle la perfection! Les perles pullulent à la surface du papier. J'ai rapporté pour vous "le grattement rhumatismal de l'aiguille du gramophone" mais ce choix est subjectif. Il y a abondance. Les images fleurissent, foisonnent, époque après époque...

… Epoque après époque, car les plus belles pages narrent la mitteuleuropa, de la nazification berlinoise des années 30, au III° Reich avec sa solution finale, en passant par l'édification du Mur, la RDA communiste, jusqu'à l'effondrement des deux blocs. le coeur du roman palpite dans les confessions de Jozeph de Heer, rescapé d'Auschwitz. Des confessions dans lesquelles on s'immerge avant de recracher quelques morceaux au goût surprenant de déjà-vu.
Car il m'est arrivé de l'oublier. Occupée à écouter Jozeph, j'oubliais qu'Omega Mineur est un roman, pas un récit. Un grand roman. Avec ses héros, son intrigue, ses rebondissements. Un thriller mené de main de maître. de la science-fiction qui fusionne. Des pages de physique qui me rappellent mon statut d'ignare scientifique. Des passages de sexe qui me ramènent à ma nationalité de Française dévergondée (puisque la critique américaine a ironisé sur la prodigieuse diversité des formules disant l'éjaculation. Moi, ça ne m'avait pas marqué et je relèverai le qualificatif de prodigieux).

Bref, cette histoire voit se croiser Jozeph de Heer et Paul Andermans, peut-être l'alter ego de Paul Verhaeghen (Belge comme lui, psychologue cognitif comme lui, écrivain dans un second temps comme lui). Un autre Paul. Paul Goldfarb, physicien, prix Nobel, allemand d'origine. Donatella, l'ébouriffée physicienne italienne qui unit les deux Paul. Nebula, le trait d'union entre Paul Andermans et l'autre Jozeph. Et l'Histoire et la Science et l'Art.
Un roman total. Pas totalement parfait mais totalement total.
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