Les enfants sont rois

Je ne peux m'empêcher de voir un double de Delphine de Vigan dans le personnage de la procédurière Clara Roussel. Cela m'a frappée en lisant ces quelques lignes : « Il fallait nommer les images, les décrire, les ordonner. Il fallait les extraire de cet espace infini […] où elles étaient à la fois dissimulées et surexposées. […] Il fallait les déplacer dans le monde réel. Pour cela, les mots étaient sa seule arme. Pour que d'autres prennent la mesure de ce qu'elle avait vu -ceux qui ne regardaient et ne regarderaient jamais ces images, ceux qui ignoraient jusqu'à leur existence-, il fallait continuer de les écrire. […] Car face à l'écran, pendant trois heures, à voix haute elle n'avait cessé de répéter : « Il faut le voir pour le croire. » »
Delphine de Vigan a écrit là un roman nécessaire. J'avais conscience de la folie de certains youtubeurs et de ceux qui les suivent, mais il est toujours bon d'illustrer l'idée par des exemples. Et comme je ne regarde et ne regarderai pas ces vidéos, le livre m'a amenée à suivre cet excès sans avoir l'impression de me lobotomiser… J'ai aimé suivre l'évolution de Mélanie Claux qui permet de moins la condamner, d'avoir un peu de sensibilité mêlée à notre jugement. La dernière partie, qui nous amène en 2031 et qui m'a, au début, dérangée, est finalement bienvenue et pourrait être une mise en garde éclairante pour certains « addicts ».