Journal et souvenirs sur l'expédition d'Égypte (1798-1801).

2 mai 1798
Plus tranquille et reposé, je m'occupai à voir la ville. Elle est très laide en général. Toulon est fortifié du côté de la terre comme du côté de la mer.
Les maisons sont mal bâties et n'ont ni portes cochères, ni cours. Les rues sont étroites et pavées en cailloux roulés. Ce genre de pavage des villes du midi est très fatigant pour les piétons. Un seul édifice peut paraître beau comparativement à ceux qui l'environnent, c'est l'Hôtel de la Marine, isolé au milieu de la place dite du Champ de Bataille, autrefois place d'armes. Les maisons qui lui font face sont aussi assez agréables.
Il y a un grand désagrément dans cette ville, c'est que, comme il n'y a pas de lieux d'aisances dans les maisons, le soir une grêle de "passarès" menace celui qui rentre tard. Ce mot de passarès, qui équivaut à l'avertissement gare l'eau à Paris, est donné à la chose même dont on doit se garer.
La ville est horriblement sale pendant la nuit ; mais le matin les eaux, qui viennent en abondance de la montagne, lavent les rues qui toutefois ne sont jamais plus propres que le quartier des Halles à Paris.