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Critique de AMR_La_Pirate


Quand Gwladys Viscardi m'a contactée pour me proposer son roman, Promenons-nous dans les bois, en service de presse, sa présentation de son livre m'a tout de suite intéressée car j'ai un faible pour les références revisitées.
Elle parlait de son livre comme d'une « adaptation (très) libre du Petit chaperon rouge, avec une héroïne forte, sensible et intègre, dans une ambiance inspirée des romans gothiques », ajoutant que le récit était centré sur le développement des personnages et le mystère, avec une once de magie… Tout un programme et un pacte de lecture que j'étais prête à signer !

Parmi les thèmes et situations développés dans ce roman figurent en bonne place la différence, la prédestination, la transmission d'un savoir, le secret, la découverte d'un vieux grimoire, la transgression d'un interdit, une filiation mystérieuse, l'isolement du village, le château abandonné, un bal donné, les contreparties et effets secondaires des sorts … : tous ces éléments et arguments sont, par excellence, ceux des contes et de la fantasy. Les attributs du conte d'origine, tels que la jeunesse des héros principaux, le vêtement rouge, le loup, sont rapidement présents mais habilement détournés, même si le fil conducteur de la métamorphose lupine demeure prévisible.
Les personnages se révèlent rapidement attachants, au-delà des stéréotypes. Il est évident que Gwladys Viscardi les a travaillés finement, ne se contentant pas de les transposer dans son univers et leur donnant une réelle profondeur. Ainsi, les rivalités et l'incommunicabilité familiales sont étayées et s'appuient sur de vraies problématiques.
La forêt, le village et le château, en tant que lieux emblématiques, deviennent des personnages à part entière, mystérieux, ténébreux et dangereux… C'est à la fois un décor et une ambiance que l'auteure a eu à coeur de restituer à tous les niveaux, descriptif, focalisateur…
J'ai apprécié aussi la place faite aux femmes dans un monde où « il est important que [le] savoir soit transmis de femme à femme, trop de pouvoirs [étant] déjà détenus par les hommes, [où] tant que faire se peut, il faut veiller à maintenir un certain équilibre ».
Peu à peu, le conte se transforme en thriller, avec un contraste entre le vaste espace naturel de la forêt et de la montagne qui entourent le village et le château et une certaine économie des personnages qui fait qu'à 80 % du livre, j'avais en tête quelques théories possibles sur l'auteur des meurtres frappant cette communauté. Je n'en dirai pas plus, mais je tiens à saluer les valeurs d'ouverture et de tolérance véhiculées par le dénouement et l'épilogue.

L'écriture demeure très descriptive ; les péripéties s'enchainent mais entrecoupées parfois de longueurs superflues ; il m'a fallu passer environ 15 % du livre pour prendre en compte ce rythme un peu particulier, trop laborieux, le temps que le prologue et les deux chapitres d'exposition remplissent enfin leur office. J'ai poursuivi ma lecture, plutôt captivée, ayant à coeur de valider mes déductions personnelles et désirant vraiment en savoir plus.
Il y a un réel effort pour donner à lire cette histoire dans un style assez personnel de conteuse, pour forcer l'attention : Gwladys Viscardi choisit parfois d'inverser l'ordre logique de certains syntagmes ce qui apporte une couleur un peu surannée à la narration ; comme ce n'est pas trop flagrant, cela donne vraiment un petit plus agréable à l'oreille. J'ai bien aimé également ses discrètes adresses directes aux lecteurs, du genre : « arrêtons-nous maintenant quelques instants dans le déroulement de ce récit et examinons ensemble… », « marquons à présent une pause […] et laissons les deux jeunes gens à leurs échanges triviaux, pendant que nous poursuivons en aparté »… ; l'auteure ménage ainsi ses effets et brise une narration qui, sans cela, serait trop linéaire. de même, quand la trame narrative paraît bien engagée, un peu facilement peut-être, arrive une nouvelle péripétie qui relance l'intrigue à point nommé ; l'ensemble est plutôt bien échafaudé. Dans la même logique de briser un rythme trop régulier, l'auteure ménage des effets d'annonce d'événements qui seront détaillés plus tard.
Le vocabulaire est recherché, le niveau de langage soutenu au point de devoir parfois avoir recours au dictionnaire pour vérifier une occurrence ou deux.

Par contre, j'ai relevé trop de coquilles, répétitions ou omissions, du moins dans la version numérique en ma possession (qui sont peut-être corrigées depuis).
De plus, certaines phrases pêchent par excès d'emphase ou de lourdeur et par une ponctuation déficiente ; j'en donne ici un exemple : « de ses angoisses il n'en dévoila aucune et déposa simplement un baiser sur la joue encore fraîche de la jeune fille, dans un geste qui d'apparence anodine ne traduisait le réconfort qu'intérieurement il éprouvait de se trouver en sa compagnie en ces instants d'exil ». Ce sont là des défauts non rédhibitoires auxquels une énième relecture remédiera sans doute.
Enfin, j'ai buté sur certains détails comme le blé qui arrive à maturité au début de l'automne ; même dans des contrées imaginaires, cela défie un peu trop la logique agronomique… et le rapport avec les chevaux m'a interpelée (celles et ceux qui me connaissent un peu sauront lire entre mes lignes…) ; j'aurais aimé que cette conception de la relation aux animaux soit un peu plus explicitée et contextualisée. Tel quel, cela fait un peu plaqué et on peut se demander ce que cette information anecdotique fait là.

En conclusion et malgré les réserves que j'ai formulées, ce livre est une assez belle surprise ; en effet, l'auteure a su me captiver et me garder et c'est ce que l'on attend de ce genre de lecture, entre conte et fantasy.
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