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Critique de horline


A partir de quand un discours devient un objet littéraire ? Lorsqu'il porte en lui des valeurs morales universelles ? Lorsqu'il a laissé une empreinte dans l'histoire ? Difficile à dire après avoir refermé le recueil qui compile quelques discours de Kurt Vonnegut devant les étudiants lors de cérémonies de remise de diplômes et publié à titre posthume.
Même pour le profane en la matière, on se rend très vite compte que ces discours ne répondent pas aux canons du genre. Loin des « platitudes euphorisantes », des messages messianiques et consensuels vantant des lendemains flamboyants, l'auteur américain préfère percuter le mythe de la success-story. Il ironise sur la prétention humaine et l'héroïsme du passé à travers des discours francs, sans inhibition et revêtant l'apparence d'une spontanéité décontractée. Çà donne à l'exercice une certaine vitalité burlesque.
Il en ressort le sentiment que Vonnegut s'est donné pour mission de combattre nos aliénations mentales, ce qui assigne et fige la condition de l'homme. Rien de surprenant dans la bouche d'un auteur présenté comme une figure de la contre-culture américaine. D'autant plus que l'on retrouve sa singularité dans la forme de ses allocutions : des discours déconstruits voire chaotiques, des démonstrations qui tentent d'égarer l'assistance, de l'éclabousser en parlant de solitude ou de violence pour mieux la rattraper avec des références culturelles populaires. L'expression « décrypter le discours » prend ici tout son sens chaque fois qu'il détourne des idées acquises avec une belle maîtrise de l'art du contre-pied.
C'est ludique pour les premiers, mais la succession des discours entraîne des répétitions et les idées pertinentes se trouvent noyées dans ce qui ressemble pour moi à une logorrhée diarrhéique.

Kurt Vonnegut est présenté comme l'un des conférenciers les plus sollicités aux États-Unis et je dois avouer que j'ai du mal à comprendre cet engouement et l'effet transcendant que l'éditeur prête à ces discours. Certes, on discerne chez Vonnegut l'humaniste qui n'a rien de béat ni de désabusé mais il n'y a rien de renversant derrière ses propos confus, simplement des idées incroyablement rationnelles sensées nous mener vers une sobriété heureuse.
On devine l'homme habile pour mettre en scène une parole bienveillante et extravagante, et c'est peut-être là le défaut de ce recueil. Ces discours ne sont pas faits pour être lus. Il manque la voix, les respirations, le sens de l'ellipse, sûrement les connivences avec le public et j'ai peut-être pour ma part des lacunes en lien avec la production littéraire de Vonnegut (non familière avec la plume de l'écrivain américain, je suis incapable de déceler d'éventuelles références à son oeuvre).
Rien de bien remarquable d'un point de vue littéraire mais ça se lit sans déplaisir non plus.
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