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Critique de jg69


Vivre à Port-au-Prince

Nous sommes à Port-au-Prince, ville qualifiée de "cri de douleur", dans le quartier Carrefour, le plus pauvre de la ville "Carrefour dans Port-au-Prince, c'est Haïti dans le monde".

Là vit ou plutôt survit une famille avec ses 5 enfants. le père est maçon à la petite semaine sur les chantiers, la mère est "brasseuse c'est à dire marchande ambulante de serviettes, parfois lessiveuse, parfois repasseuse", ils mènent une vie misérable et ont du mal à nourrir leurs enfants.
C'est un couple uni qui s'aime, rêve de se marier et fonde beaucoup d'espoir sur l'avenir de leur fille aînée Babette, belle et intelligente. Ils aimeraient bien lui trouver un bon parti.

L'auteur parvient dès les premières pages à nous plonger dans l'atmosphère grouillante de Port-au-Prince, on visualise d'emblée cette foule aux tenues bigarrées, ces "arcs en ciel", cette ville où "c'est chaque jour le carnaval", on entend les conversations dans les camionnettes où tout le monde s'entasse... Ils sont des milliers de personnes à brasser la ville (d'où le titre du roman) à s'agiter pour survivre dans une extrême misère, où souvent la seule solution de survie est la prostitution "tout le peuple se putanise". "Parfois, si je ne me donnais pas au voisin, la chaudière ne monterait pas le feu".

Un jour Erickson, un homme marié bien plus âgé que Babette l'aborde, la prend comme maîtresse et entretient toute la famille. Babette devient blonde et est surnommée la Barbie d'Erickson dans le nouveau quartier où la famille vit désormais loin de leur bidonville.

Cette nouvelle vie va bouleverser l'équilibre familial, les parents sont partagés entre la culpabilité, la honte, le remords et la colère.
"Je me hais de vivre dans un pays où la naissance d'un enfant est un crime contre ses frères et soeurs. Je déteste ce monde où les familles sont obligées de vendre leurs filles pour entretenir leur famille."

Ce sera l'éclatement de la famille lorsque le fils ainé qui adore sa soeur va quitter la maison. "Nos enfants ne nous pardonneront pas d'avoir donné leur soeur en pâture à un inconnu".

On pressent le drame qui va survenir, on sent que le noir va recouvrir le carnaval et les images bariolées...

Ce roman est une grande fresque sociale de Haïti, l'auteur y parsème aussi des critiques sur la communauté internationale, les ONG, le traitement de l'information et évoque la corruption de l'état.

Les brasseurs de la ville est un premier roman très réussi qui "brasse" le lecteur.
J'ai aimé le style de narration choisi, l'auteur mêle les voix du père et de la mère sans prévenir le lecteur comme s'ils ne faisaient qu'un. J'ai aimé l'écriture très visuelle qui touche tous les sens avec des couleurs, des odeurs, des bruits à chaque page, même si je m'attendais à une écriture encore plus imagée. Un livre fort, une plongée dans la vie et les tourments du peuple haïtien bien réussie.
Lien : http://leslivresdejoelle.blo..
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