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Critique de dourvach


1896 : "The Island of Doctor Moreau" fut un immense choc pour ses lecteurs et la critique anglophone, on le conçoit ! A la fois chef d'oeuvre d'empathie et oeuvre incroyablement dure et "cruelle"...

Grand-petit théâtre de la cruauté (hélas bien humaine et pérenne).

Car les créatures de ce médecin dévoyé "subissent" leur morne existence, tout comme la créature "de bric et de broc" imaginée par la douce Mary W. Shelley, subissant - du fait de sa simple mise au monde - les fantaisies scientifiques de son géniteur, ce fichu Baron Victor Frankenstein ("Frankenstein ou le Prométhée moderne", 1818)...

Ici un récit implacable. Trois êtres humains : le "bon docteur" Moreau, cet ivrogne de Montgomery et leur naufragé accidentellement "recueilli" (Edward Prendick)...

Autour d'eux, en parfaite liberté ou soigneusement isolés dans un enclos (le temps d'un charcutage chirurgical sans nulle anesthésie : ce ne sont "que" des bêtes, n'est-ce pas ?), "cheptel" de créatures hybrides, sinistre descendance - inlassablement générée - du Vivisecteur et de son assistant...

Imaginez des "Hommes-Porcs" mais aussi des "Hommes-Singes" ou cet "Homme-Hyène" ou cet autre "Homme-Léopard" (avant "Leopard Man", film clôturant la trilogie célèbre de Jacques Tourneur qui - dans les années 1940 - rendit "La Féline" ["Cat People"] et "I walked with a Zombie" aussi insurpassables qu'inoubliables)...

Tragédie du trait d'union.
Noir-et-blanc aux contrastes atroces.

"Une île au large de l'espoir...", comme la chantait Jacques Brel, anticipant l'Hiva Oa enchantée de ses chères "Marquises". Sauf que le contexte est ici absolument contraire, hélas, aux rêves de fraternité du grand artiste bruxellois disparu en 1978...

Certes : unité de temps, de temps.

"L'enfer c'est les autres." : ce fameux "Huis clos" de Jean-Paul Sartre. Avec la sinistre "éternité" de tout enfer qui se respecte...

Tout cela est fort bien dit (et subi) mais reste cette pragmatique question pour l'infortuné Prendick : "Comment s'en sortir ? "...
Stratégie du survivant célébrée dans le magnifique film "Seul au monde" de Robert Zemeckis (2000, solidement interprété par Tom Hanks) et qui se révélera ici la seule opérationnelle - soit un "éloge de la fuite" selon Henri Laborit.

Mais il y aura le sang, les crocs, la douleur et la mort avant d'atteindre la supposée "échappée belle"...

- A lui, la maison de souffrance.
- A lui, la main qui crée.
- A lui, la main qui blesse.
- A lui, la main qui guérit.
[...]
- A lui, l'éclair qui tue.
- A lui, la mer profonde [...].

Enoncé de "la Loi" par ses fidèles hommes-animaux, craignant atrocement la main-toute-puissante de leur pauvre "dieu" créateur...

Roman construit en quatorze chapitres denses, jusqu'à "L'homme seul" qui sonne le glas : comme un retour à notre simple condition humaine, sans aucune possibilité d'échapper à notre Destin (fatalement tragique).

Wells fut vraiment un INVENTEUR - et (croyez-moi) il en est peu, capables de hanter si durablement le Monde des Lettres de tous leurs cauchemars fécondants...
Lien : http://www.regardsfeeriques...
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