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Critique de Apoapo


J'ai enfin trouvé en ce livre, étrangement édité par une maison mineure au lieu que par les PUF, en 2016, ce que je cherchais depuis longtemps : pas un essai sur une thématique ponctuelle relative aux migrations (pas non plus un pamphlet comme l'auteure en a déjà publiés), mais ce qui ressemble le plus à un traité, c-à-d. un exposé systématique et didactique de l'ensemble des sujets qui composent la matière. Avec cela, l'étude n'est pas longue – moins de 200 p. -, sa lecture reste très abordable et les références (notes et bibliographie) sont extrêmement succinctes : la lecture idéale à recommander à un étudiant ou à un lecteur non spécialiste qui souhaite, en un seul livre, mettre à l'épreuve critique ses idées reçues sur une problématique dont la couverture médiatique et le discours politique sont aussi prolixes qu'absolument inadaptés – sinon délibérément idéologiques et mensongers.
En effet, la déconstruction de la vulgate sur les migrations, mais aussi sur l'octroi de l'asile, sur les politiques européennes d'immigration, sur l'histoire migratoire française (y compris la question des « générations » issues de l'immigration), enfin sur les questions juridiques de droit public et international concernant la citoyenneté, les frontières, l'émergence d'un « droit à la mobilité » et d'une « gouvernance globale des migrations », ci opérée, se fonde sur la démonstration de la péremption des anciennes caractéristiques des migrations, et donc des connaissances, croyances et politiques afférentes. S'il y a inadéquation des politiques aux réalités contemporaines – le cas le plus flagrant étant la nécessité périodique d'opérer des régularisations de sans-papiers dans un régime de fermeture des frontières – c'est d'abord parce que les réalités ne sont pas comprises, les problématiques refoulées ou leur lecture idéologisée à des fins électoralistes ou pour servir des intérêts particuliers – tels ceux de l'industrie de la sécurité.
Ainsi, dans le chap. Ier, « La mondialisation des migrations, une nouvelle bipolarité », ce sont les aspects systémiques du phénomène, dans une nouvelle temporalité, une nouvelle géopolitique, de nouveaux acteurs et intérêts en concurrence avec les États, de nouvelles caractéristiques des migrants, de nouveaux enjeux globaux et régionaux, enfin dans une dialectique mal comprise entre migration et développement qui sont étudiés.
Le chap. II, « La "crise" des réfugiés », se penche sur le droit d'asile, qui a explosé depuis les années 1990, dans sa perspective européenne et se demande si le réfugié est « un élément de désordre dans l'ordre international », de même qu'il se pose la question des déplacés environnementaux – « les migrants de demain ? » - catégorie encore inconnue du droit international.
Le chap. III, « L'Europe, un continent d'immigration qui tarde à se reconnaître comme tel », donne dans ce titre la raison de la faillite des politiques européennes : ainsi, l'espace euro-méditerranéen est en passe de devenir « l'une des plus grandes lignes de fracture au monde », et les instruments de sa politique entièrement sécuritaire montrent leurs limites alors qu'ils engloutissent d'énormes ressources.
Le cap. IV, « La France et ses migrations internationales » se compose à la fois d'un rappel historique sur ses « Cent soixante ans d'immigration » et d'une courte étude sur ce qu'on a coutume d'appeler la question de « l'intégration » des descendants des migrants.
Suivent enfin deux chapitres juridiques, qui synthétisent d'autres travaux plus connus de Wihtol de Wenden : « Citoyenneté, État-nation et migrations » - une étude de l'évolution de la notion de la citoyenneté, au niveau international et français dans ses influences réciproque avec le droit européen, et « Vers un droit à la mobilité ? » - sur l'évolution des frontières et « l'émergence d'une gouvernance globale des migrations ».
Une synthèse donc de multiples sujets, efficace et indispensable à appréhender le phénomène migratoire de façon actuelle et dans la complexité qui le caractérise.
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