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Critique de Sharon


C'est très étrange de commencer la rédaction de cet avis, mais je n'ai pas aimé l'héroïne. Je n'ai jamais été « avec elle », je n'ai jamais été émue avec elle. Je n'ai même pas réussie à avoir de l'empathie pour elle en dépit de ce qu'elle a traversé. Pour quelles raisons ? Cela tient d'abord à pas grand chose, une petite phrase qu'elle a dite, et qui m'a fait ouvrir les yeux sur l'univers dans lequel elle vit : dans ce livre, toutes les adolescentes (et les femmes aussi) sont minces, très minces. La phrase, la voici (ou plutôt, la proposition) : « une maigreur que seul le métabolisme d'un corps adolescent peut vous octroyer ». Je dédis cette phrase à toutes les ados à qui une malheureuse part de gâteau valait trois jours de régime pour perdre le poids pris, à celles aussi qui ont souffert de boulimie : le « métabolisme adolescent » n'empêche pas la prise de poids. Bref, l'héroïne est psy, et méconnait certaines pathologies.
Pas sa faute, me direz-vous. Elle est devenue psy justement parce que tous les psys qu'elle avait consulté pendant son adolescence n'avait été d'aucun secours pour elle, elle n'était qu'un catalogue de pathologie à elle toute seule. Aucun psy n'a pu aider son frère non plus. Que s'est-il passé ? Leur père est un tueur en série, il a tué six jeunes filles, six adolescentes, toutes différentes. C'est Chloé qui a trouvé des preuves contre son père, c'est à cause d'elle – ou grâce à elle, selon le point de vue adopté – qu'il a été condamné. Aujourd'hui, la vie de Chloé est pourtant sereine, elle est fiancée, son cabinet de consultation ne manque pas de patients. Son frère Cooper n'apprécie pas son fiancé – réflexe quasi normal pour un grand frère, dans cette situation. Tout pourrait aller presque bien, si ce n'est qu'un journaliste veut à toute force interviewer Chloé pour écrire un article spécialement pour les vingt ans de l'affaire. Et une jeune fille disparaît, exactement comme cela avait été le cas vingt ans plus tôt. Qui a pu agir ainsi ? Un imitateur ? Un admirateur ? J'avais pour ma part une troisième proposition à fournir, mais je pense que toutes les personnes qui ont l'habitude de lire des romans mettant en scène des tueurs en série y auront pensé aussi.
Chloé est psy mais elle n'a jamais pu se délivrer de ses peurs, de ses obsessions. A douze ans, le cocon dans lequel elle avait été élevée, qui l'avait préservé, a brusquement éclaté et elle a dû voir la réalité telle qu'elle était vraiment, non celle qu'elle avait vu jusqu'à présent, ses parents ayant tout fait pour la préserver. Ce n'est pas que tout l'effraie depuis, c'est plutôt que certaines situations la mettent sur le qui-vive et qu'elle n'interprète pas toujours tous les indices de la bonne manière. Si elle était la seule à agir de cette manière, eh bien les enquêtes policières seraient résolues beaucoup plus vite, ce qui n'est pas le cas (ni dans les romans, ni dans la vie). Note : si tout le monde était parfaitement et entièrement sincère envers elle, peut-être ne s'emballerait-elle pas si vite.
Le roman nous fait passer du présent au passé, reconstituant l'affaire originelle, amenant aussi la Chloé du présent à se remémorer ce qui s'est passé, sans toutefois que l'adulte qu'elle ait ne jette (du moins, pas tout de suite) un regard neuf sur ce qu'elle a vécu, parce qu'elle était trop à l'intérieur de l'affaire, proche à la fois du coupable et de la première victime, qu'elle admirait, comme une ado de douze peut admirer une ado de quinze ans (une ado de douze ans naïve, oui, je sais, je me répète, il n'est d'ailleurs jamais question ni des premières règles, ni de la puberté, Chloé, à douze ans, semble encore très « petite fille », un présupposé peut-être nécessaire pour sa naïveté). Il lui faudra être bousculée, malmenée, devenir adulte si j'ose dire, pour qu'elle se pose (enfin) quelques questions, pour qu'enfin, les deux affaires, l'ancienne comme la nouvelle, évoluent.
Un roman différent, mais qui ne me donne pas forcément envie de découvrir un autre livre de cette autrice.
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