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Critique de VABO1


Voici un livre étrange mais habile. ( Lu dans le cadre du prix premières paroles)
Au début je m'agace du style. Un style parlé d'aujourd'hui avec des expressions parfois incompréhensibles, une immersion dans les réseaux sociaux avec leur mode de communication si spécifique, des acronymes et les images qui vont avec. Face jaune qui s'interroge. Les dialogues et pensées sont directement insérés dans le texte... Je rame à saisir ce que dit l'autrice, reviens en arrière et relis....puis, comme dans une langue étrangère, l'immersion fait son oeuvre et je saisis les subtilités de l'histoire et la psychologie des personnages. Je suis embarquée par cette histoire folle et pourtant inspirée d'un fait divers réel, celle des reclus de Monflanquin.
" Ils ont mis leur intelligence en jachère " nous dit l'autrice, reprenant la plaidoirie de l'avocat défenseur de la famille escroquée pour expliquer comment un groupe de personnes cultivées peut se laisser totalement manipuler et dépouiller.
Dans ce livre l'autrice s'inspire de ce fait pour nous raconter une histoire d'emprise et de paranoïa collective qui s'alimente de la peur que génère notre société. Nous sommes dans le contexte des attentats de 2015 ( Charlie et le Bataclan), de la peur des terroristes qui peuvent se cacher derrière chaque migrant. Les réseaux sociaux sont une voie royale pour véhiculer les théories complotistes les plus extravagantes, qui pourront néanmoins être gobées sans discernement. Les commentaires des "influenceurs" font et défont les notoriétés : les avis se construisent sur du vide, nul besoin de connaissances, de faits vérifiés, l'important c'est d'être réactif et d'être "liké". Les différents personnages sont tous pris, d'une manière ou d'une autre, dans cette frénésie de reconnaissance. La mère qui a 70 ans veut rester jeune à tout prix! Samuel le chirurgien esthétique qui veut être reconnu par ses pairs pour une invention qui permet de faire des rhinoplasties parfaites. Clotilde, qui après avoir suivi son mari muté au quatre coins du monde, s'épanouit en partageant des recettes de cuisine sur des blogs. Paul, "youtubeur" en perte de vitesse qui s'imagine être un journaliste, fraie avec l'extrême droite. Un mail venu de Syrie, d'un demi-frère dont l'existence leur était inconnue est l'élément déclencheur de cette paranoïa qui va crescendo. L'insuffisance d'attention et d'amour dans l'enfance peut créer une fragilité psychologique, terreau propice à la manipulation. Les conjoints et enfants sont emportés eux aussi. C'est le confinement avant l'heure! Paul organise la protection de la famille, recluse à Yerville en Normandie.
Montrer patte blanche signifie prouver son identité pour rentrer dans un lieu. L'expression est attribuée à une fable de Jean de la Fontaine, le loup, la chèvre et le chevreau. Et comme nous dit Kinga Wyrzykowska "les chevreaux s'affolent plus vite que les loups". Ils comprendront peut-être que le loup est dans la Bergerie.
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