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Critique de Yaena


Yaena
17 décembre 2018
En tournant la première page, on pousse la porte du saloon. Derrière le bar, un type nous lance un regard méfiant tout en astiquant les verres. Les santiags font grincer les lattes du vieux plancher en bois et les éperons battent la mesure de leur cliquetis sinistre. A l'affût, on guette le bruit du 6 coups dont on vient d'armer le chien en croisant le regard d'acier de l'inconnu au visage à moitié dissimulé par un chapeau aux bords élimés. Il sent la poussière, la sueur et le whisky frelaté. Notre 6ème sens de lecteur en éveil on sent qu'il va y avoir du grabuge dans ces lignes et ça ne va pas être beau. Alors on s'assoit au bar et on attend que ça parte en vrille et on est pas déçu parce que dès les premières pages ça dérape. Zahler reprend les codes du genre mais en plus noir et plus glaçant. Ses personnages ne sont pas des enfants de choeur. Sur l'échelle de Zahler on a les méchants, les affreux et les psychopathes exit les gentils. On en croise bien un ou deux mais il s'agit là d'une espèce en voie de disparition. Nos héros sont d'ailleurs des bandits de grands chemins, de ceux qui ont leur portrait avec écrit en gros WANTED en dessous. Certes, ils sont repentis mais leur exactions ont de quoi glacer le sang. Pourtant l'auteur arrive à nous les faire aimer ces affreux. Surtout qu'Oswell, Godfrey, Dicky et James sont rangés et tentent de se construire une seconde vie loin de ce qu'ils étaient. En peu de pages l'auteur arrive à leur construire une vie, un passé, des projets et à leur donner une véritable consistance et des personnalités propres. Alors forcément on s'y attache même si on ne devrait pas car quand leurs anciens associés se mettent en tête de les retrouver vous vous doutez bien que ce n'est pas pour parler du bon vieux temps. Eux ce sont de vrais méchants, du genre psychopathes dénués de toute morale et de tout empathie mais je ne vous en dit pas plus...

Zhaler brouille les frontières entre le bien et le mal et nous propose des personnages brut de décoffrage dominés par l'instinct. Il sollicite constamment nos 5 sens, comme les personnages nous sommes aux aguets. On tourne les pages avec méfiance tout en sachant que le pire est inéluctable. On ressent ses mots autant qu'on les lit. Zahler a un talent certain pour nous happer : on danse un quadrille endiablé les bottes qui maltraitent le plancher et la sueur qui coulent le long de notre nuque. On chevauche aux côtés des cow boys en plein désert, du sable plein les dents, une odeur de poudre flottant dans l'air. On entend le bruit des chevaux lancés au galop et des coyotes qui hurlent au loin leur désespoir. C'est une immersion dans l'ouest sauvage que nous offre Zahler mais il va au delà en nous poussant à nous interroger sur la possibilité d'une seconde chance et le droit au pardon. A-t-on vraiment le choix de ce que nous devenons? Tout ça servit pas une écriture riche, explosive, survoltée.

J'ai adoré ce western noir et sans concession. C'est violent voir même parfois assez trash mais c'est tellement bien construit. Un petit bémol mais vraiment tout petit: ça manque de personnages féminins charismatiques. Comparé aux gaillards que j'ai croisé les dames m'ont paru un peu fade.

J'ai découvert cet auteur grâce à la très bonne critique de Stockard sur «Les spectres de la terre» du même auteur, que je vais d'ailleurs m'empresser de lire. Si jamais elle passe par ici : Merci Stockard pour cette découverte :)
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