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Critique de cecilestmartin


Hasard des lectures, après avoir achevé le fils du pauvre, j'enchaîne avec L'art de perdre qui me ramène vers les contrées de la Kabylie. J'ai dévoré ce roman dont j'ai aimé la construction, la simplicité avec laquelle la complexité des situations et des personnages est traitée, la façon d'évoquer une période sombre de l'histoire de l'Algérie et de la France en nuances, sans manichéisme, sans jugement, le style direct où l'utilisation du présent de l'indicatif rend le propos incisif.
Ali, Hamid, Naïma, trois générations qui tentent de donner du sens à l'exil, puis à l'exclusion organisée par le gouvernement français à l'arrivée des harkis en métropole, et pour qui la nécessité de faire table rase du passé s'impose pour continuer, pour avancer. L'histoire de la famille incarne bien la difficulté à se construire quand l'Histoire décide pour vous, quand elle oblige à faire des choix qui n'en sont pas. Ali choisit de se faire oublier pour mieux s'intégrer, au risque de s'oublier lui-même, et incarne bien cette première génération qui a travaillé dans les usines, sans rien demander jamais.
Hamid, l'aîné de la famille, le premier à maîtriser la lecture et l'écriture du français, va progressivement médiatiser les relations de ses parents (et des tous les voisins) avec leur pays d'accueil, avant de fuir à Paris – une issue pour échapper au poids de l'histoire familiale. Aux questions de Clarisse, son amoureuse, sur son enfance, Hamid se réfugie dans le silence, se ferme, s'isole tant il est douloureux d'évoquer un passé dont on ne comprend pas vraiment le sens.
Pour Naïma, une des quatre filles d'Hamid, les racines familiales ne pèsent pas, elle ne les questionne vraiment qu'au moment où les attentats de 2015 se produisent. Jusque-là, elle ne vit aucune tension particulière liée au fait que sa famille est harkie. Elle sera celle qui entreprend le voyage de retour.
Le narrateur intervient peu dans le récit mais donne des indications, oriente le lecteur ou indique ses propres incertitudes sur le devenir de ses personnages. Une posture intéressante, en extériorité.
Un roman réussi qui pose des questions pertinentes, sans que la dimension romanesque n'en pâtisse, on quitte à regret à la famille d'Ali.

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