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Critique de Fleitour


Stefan Zwieg, est sans doute l' une des plus sombres figures de la mélancolie, avec l'Ivresse de la métamorphose il rejoint Virginia Wolf ou Charles Baudelaire, qui implore "soit sage oh ! ma douleur et tient toi plus tranquille."

Il n'attendra plus. le 22 févier 1942 il se donnera la mort ; "je le sais maintenant, cela ne viendra plus, je n'ai rien de bon à attendre."

Et nous lecteur nous réalisons, aujourd'hui, ce lien charnel qui unit Francis Scott Fitzgerald et Zweig à travers le livre culte Gatsby le Magnifique, comme si le roman inachevé devait magnifier et compléter l'oeuvre de Scott Fitzgerald.( lire les chroniques sur  Gatsby le Magnifique) Christine répondant à Gatsby.

Le séjour au Palace Hôtel en Suisse, de Christine Hoflehner, renvoi aux soirées magnifiques données à la propriété de Gatsby, le même luxe la même frénésie de musique, de danse, d'étalages de richesses, de désirs d'épater, de séduire. La jeune Christine va se métamorphoser, permettant à Stefan Zweig de donner une luxuriance à ce séjour, rendre vivante sa sensualité, et "de quelle étoffe mystérieusement délicate et malléable notre âme est constituée, puisqu'un seul événement suffit pour l'agrandir à l'infini et lui faire englober dans son espace minuscule un univers entier." 

la grande pudeur de Christine répond à l'extrême timidité de Gatsby, deux êtres simples qui ne vivent pas de flatteries. Christine, qui se fait appeler van Boolen comme sa tante, encore éblouie, murmure : "ces simples mots, déchirants comme la lueur d'un éclair l'atmosphère lourde d'un bureau autrichien, avaient été écrits quelques minutes auparavant, à trois contrées de distance, dans l'ombre fraîche des glaciers sous un ciel d'Engadine d'un pur bleu gentiane, et l'encre n'était pas encore séchée sur la formule de l'expéditeur que déjà son message et son appel bouleversaient un coeur."

Les mots chatoyants de Zweig, virent au cauchemar, le jour où les rumeurs circulent pour le plaisir de médire, cette van Boolen n'est qu'une usurpatrice une moins que rien, comme Gatsby, soupçonné d'avoir tué un homme ?

Quittant le Palace Hôtel et ses rumeurs, dans la honte, sa pauvreté et sa petite valise à la main Christine s 'effondre ? " Je ne crois plus à rien, ni en Dieu, ni en l'État, ni à un sens quelconque du monde, à rien."

Rejoignant son bureau de poste, ce sont ses espoirs qui sombrent, "Vous allez me dire qu'il n'y a pas de honte à être pauvre, mais c'est faux. Si on ne peut pas le dissimuler, c'est une honte. Il n'y a rien à faire, on a honte comme il arrive, lors d'une invitation, que l'on fasse une tache sur la nappe. Méritée ou non, honnête ou crapuleuse, la pauvreté pue. Oui, elle pue comme peut puer une chambre au rez-de-chaussée donnant sur une courette, comme puent les vêtements pas assez souvent renouvelés."

Dans cette seconde partie, Zweig nous parle, de l'absurdité du monde, de l'aveuglement de l'administration, de la difficulté à communiquer, la même angoisse que celle exprimée par Christine puis pas Ferdinand rencontré à Vienne.
Ce sont deux êtres ballottés qui bientôt vont évoquer le suicide, car "il en est de même pour la douleur, le désespoir, l'abattement, le dégoût, la peur. Une fois emplie jusqu'au bord, la coupe n'admet plus la plus petite goutte supplémentaire que lui verserait le monde."

Est ce la fin envisagée par Zweig ? Dans cette deuxième partie c'est un écho à Fitzgerard comme une explication de l'impasse de leurs personnages et enfin d'eux mêmes .

Le dernier geste de Zweig interpelle ceux de ses lecteurs qui entretiennent avec lui un rapport de familiarité, "je les vois rentrer le soir dans les tramways, du plomb dans les yeux, du plomb dans les jambes, tous épuisés par un labeur dénué de sens ou dont le sens leur échappe" nous dit Zweig, c'est ce "dénué de sens" qui va sans doute précipiter son geste.

Francis Scott Fitzgerald nous dit que le Monde est Cruel
Stefan Zweig ajoute Cruel et Absurde.

Un très beau texte écrit avec la grâce d'un écrivain génial.
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