Citations sur Ivresse de la métamorphose (60)
Et, pour la première fois, à ce moment, un être, objet d'une révélation bienheureuse qui l'ébranle dans ses profondeurs, commence à entrevoir de quelle étoffe mystérieusement délicate et malléable notre âme est constituée, puisqu'un seul évènement suffit pour l'agrandir à l'infini et lui faire englober dans son espace minuscule un univers entier.
La force mystérieuse de la métamorphose agit dans un nom ; comme un anneau au doigt, il semble de prime abord pur hasard, sans conséquence, mais avant que l’on ait conscience de sa puissance magique il se développe en vous, sous votre peau, et s’unit, sceau du destin, à l’existence spirituelle d’un être.
La vitesse de l’étincelle électrique, plus rapide que notre pensée, nous semble toujours inimaginable. Car ces simples mots, déchirant comme la lueur d’un éclair l’atmosphère lourde d’un bureau autrichien, avaient été écrits quelques minutes auparavant, à trois contrées de distance, dans l’ombre fraîche des glaciers sous un ciel d’Engadine d’un pur bleu gentiane, et l’encre n’était pas encore séchée sur la formule de l’expéditeur que déjà son message et son appel bouleversaient un cœur.
Combien de temps cela va-t-il encore durer ? et qu'attendre ? J'ai trente ans et je n'ai encore rien pu réaliser de ce que je souhaitais. Toujours embauché, débauché, et chaque mois, je vieillis d'une année. Je n'ai rien vu du monde, rien obtenu de la vie si ce n'est cet espoir : cela viendra, c'est le commencement. Mais, je le sais maintenant, cela ne viendra plus, je n'ai rien de bon à attendre.
Sa tante arrive, (…) et lui rappelle la promenade commune promise tandis que l’oncle passe sa journée au poker. Est-ce vraiment la même route que celle d’hier ou bien une âme plus ouverte, plus épanouie, voit-elle les choses plus claires, plus gaies, qu’une âme étriquée ?
« Ah, une nuit magnifique… Voyez les étoiles… » […] Mais Christine, toujours tremblante, ne l’entend pas. Que lui font les étoiles, la nuit ? Elle n’a intérêt que pour elle-même, pour son pauvre moi étouffé, oppressé, opprimé depuis des années qui soudain se soulève monstrueux dans sa douleur et déchire sa poitrine.
Une rumeur atteint toujours en dernier lieu celui ou celle qu'elle concerne.
Qui éprouve de vifs sentiments observe peu.Les gens heureux sont de mauvais psychologues.Seul l'individu inquiet aiguise ses sens au maximum.L'instinct du danger lui insuffle une perspicacité qui dépasse de loin celle qui lui est naturelle.
Elle n'a intérêt que pour elle-même, pour son pauvre moi étouffé, oppressé, opprimé depuis des années qui soudain se soulève monstrueux dans sa douleur et déchire sa poitrine.
Les yeux fixes, les épaules basses, la voilà assise fixant le mur hostile et froid, et elle attend, elle attend dans l'espoir que, si désirée, une joie tardive se manifestera peut-être. Mais rien ne bouge, une impression de silence et de vide comme une forêt sans oiseaux. De toutes ses forces elle cherche à se souvenir, à vingt-huit ans, quelle sensation est-ce, la joie. Et elle constate avec épouvante qu'elle ne la connaît plus. C'est comme une langue étrangère, apprise dans l'enfance, qu'on a oubliée et qu'on sait seulement avoir connue.