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Maria

Série de 2 livres (En cours). Écrite par Kazuo Kamimura (2),

Maria, tome 1 par Kamimura
tome : 1
Maria, tome 2 par Kamimura
tome : 2

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Dernières critiques
Maria, tome 2

Je ne connaissais pas Kazuo Kamimura, dont la bibliographie semble assez étonnante et intéressante, mais j'avais envie de lire la série "Maria" depuis longtemps, attiré par les couvertures, le nom de l'auteur et surtout parce qu'elle n'était pas sur le site BDthèque.



La lecture fut étonnante, autant sur l'histoire que sur le dessin et surtout le sujet. La Bd date du début des années 70 (la première version du moins) et malgré ses cinquante ans aujourd'hui, elle reste terriblement d'actualité. Qu'a donc vécu Kamimura pour écrire une histoire de ce genre ?

Le scénario est très flottant, dans une ambiance qui ne se pose jamais véritablement. On passe d'une lycéenne qui semble se donner facilement à une fille qui l'aime à un conflit familial, puis à une errance dans le Japon, le temps de se poser dans un petit village et la fin arrive, loin de tout. Je ne saurais pas retranscrire exactement l'ambiance, mélancolique et désenchantée. C'est assez étrange à lire mais très prenant.



Le dessin frappe d'entrée de jeu. Entre le portrait de Maria, en finesse et visiblement inspiré par des peintures japonaises et son trait qui est assez typé dans le genre du vieux manga, c'est un étonnant mélange mais dont la finesse fait ressortir la beauté qu'il veut fixer. Il y a un vrai travail de composition et de caractérisation par le dessin (j'y reviendrai). C'est d'autant plus étonnant qu'il ne s'embarrasse souvent pas de décors ou d'éléments concrets entourant son personnage. Le vide de l'existence est ici symboliquement présent partout.



Au-delà de ces qualités, la vraie force de l'œuvre, c'est son propos. Maria est une jeune femme très évanescente mais aussi diablement concrète. Elle refuse de jouer le rôle qu'on lui a assigné dans la société japonaise : mauvaise fille, mauvaise élève, mauvaise mère, mauvaise amie, elle n'est jamais la femme idéale. Pourtant sa beauté saisit tout les hommes et femmes qui croisent sa route. Elle est révélatrice de l'hypocrisie de cette société, en déclenchant chez les autres les comportements que l'auteur condamne. C'est particulièrement net dans le regard des hommes, qui la voient tous comme une femme hautement désirable voir parfois la femme de leur vie. Ces comportements machistes et puérils sont mis en lumière dans le regard, l'attitude, les gestes, les propositions déplacées… Maria navigue dans un monde où sa condition de femme est une souffrance, mais qu'elle se refuse à porter.

Il y a de nombreux sujets évoqués : la dualité mère-putain, assez explicite dans le récit, mais aussi plein de sujets que je ne m'attendais pas à voir explorer par un mangaka des années 70 : homosexualité (masculine et féminine), divorce (Kamimura semble partisan de celui-ci), pouvoir détenu par les hommes, prostitution, inceste, viols, violence éducative, craintes superstitieuses… C'est sombre, très sombre, à ne pas mettre entre toutes les mains.



Et pourtant, le manga est positif, malgré toute cette noirceur. Comme une nouvelle naissance, Kamimura s'empare de son personnage pour rejeter une société qu'il n'aime pas. Une société qui opprime les femmes en les confinant au rôle de mère/épouse ou de putain de service pour assouvir les besoins des hommes, toujours seigneurs et maitres. Il critique également le rôle bien trop important de la famille ainsi que ce qu'il faut y sacrifier. Le tout est exposé par une Maria qui sait jouer de son corps pour rendre fou les hommes, mais se pose aussi des questions sur l'éducation qu'on donne aux jeunes hommes. Son personnage est un véritable catalyseur de tout ce qui dysfonctionne, mais met aussi en lumière ce qu'il y a de bon dans l'être humain. Plusieurs histoires semblent presque anecdotiques dans le récit mais renvoient, selon moi, à ce que Kamimura déteste de sa société.

Mais sa fin heureuse, en tout cas positive, invite à un nouvel espoir. Peut-être porté par les idéaux de la période (nous sommes juste après mai 68) il semble annoncer une jeunesse qui va vivre différemment. Et cet espoir final est très beau.



Inspiré de cinéastes, sans aucun doute, Kamimura fait de son histoire un pamphlet que je ne peux m'empêcher de trouver féministe, non pas en avance sur son temps mais intemporel. La place de Maria dans la société, sa vie et ses choix sont étonnants mais résonnent terriblement justes. Vouloir être autre chose que ce qu'on attend de nous ne sera pas sans heurts.

Je suis très volubile, mais la lecture de ce manga a été un petit choc. J'en suis ressorti sonné, avec un long moment de réflexion et de regard dans le vide. Je crois bien qu'il y a là quelque chose qui m'a touché. Quelle corde sensible ? Impossible de le dire immédiatement, mais cette lecture va résonner encore en moi. Je ne regrette ni l'achat ni la lecture de ce manga qui me semble incroyablement bon.
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Maria, tome 1

Je ne connaissais pas Kazuo Kamimura, dont la bibliographie semble assez étonnante et intéressante, mais j'avais envie de lire la série "Maria" depuis longtemps, attiré par les couvertures, le nom de l'auteur et surtout parce qu'elle n'était pas sur le site BDthèque.



La lecture fut étonnante, autant sur l'histoire que sur le dessin et surtout le sujet. La Bd date du début des années 70 (la première version du moins) et malgré ses cinquante ans aujourd'hui, elle reste terriblement d'actualité. Qu'a donc vécu Kamimura pour écrire une histoire de ce genre ?

Le scénario est très flottant, dans une ambiance qui ne se pose jamais véritablement. On passe d'une lycéenne qui semble se donner facilement à une fille qui l'aime à un conflit familial, puis à une errance dans le Japon, le temps de se poser dans un petit village et la fin arrive, loin de tout. Je ne saurais pas retranscrire exactement l'ambiance, mélancolique et désenchantée. C'est assez étrange à lire mais très prenant.



Le dessin frappe d'entrée de jeu. Entre le portrait de Maria, en finesse et visiblement inspiré par des peintures japonaises et son trait qui est assez typé dans le genre du vieux manga, c'est un étonnant mélange mais dont la finesse fait ressortir la beauté qu'il veut fixer. Il y a un vrai travail de composition et de caractérisation par le dessin (j'y reviendrai). C'est d'autant plus étonnant qu'il ne s'embarrasse souvent pas de décors ou d'éléments concrets entourant son personnage. Le vide de l'existence est ici symboliquement présent partout.



Au-delà de ces qualités, la vraie force de l'œuvre, c'est son propos. Maria est une jeune femme très évanescente mais aussi diablement concrète. Elle refuse de jouer le rôle qu'on lui a assigné dans la société japonaise : mauvaise fille, mauvaise élève, mauvaise mère, mauvaise amie, elle n'est jamais la femme idéale. Pourtant sa beauté saisit tout les hommes et femmes qui croisent sa route. Elle est révélatrice de l'hypocrisie de cette société, en déclenchant chez les autres les comportements que l'auteur condamne. C'est particulièrement net dans le regard des hommes, qui la voient tous comme une femme hautement désirable voir parfois la femme de leur vie. Ces comportements machistes et puérils sont mis en lumière dans le regard, l'attitude, les gestes, les propositions déplacées… Maria navigue dans un monde où sa condition de femme est une souffrance, mais qu'elle se refuse à porter.

Il y a de nombreux sujets évoqués : la dualité mère-putain, assez explicite dans le récit, mais aussi plein de sujets que je ne m'attendais pas à voir explorer par un mangaka des années 70 : homosexualité (masculine et féminine), divorce (Kamimura semble partisan de celui-ci), pouvoir détenu par les hommes, prostitution, inceste, viols, violence éducative, craintes superstitieuses… C'est sombre, très sombre, à ne pas mettre entre toutes les mains.



Et pourtant, le manga est positif, malgré toute cette noirceur. Comme une nouvelle naissance, Kamimura s'empare de son personnage pour rejeter une société qu'il n'aime pas. Une société qui opprime les femmes en les confinant au rôle de mère/épouse ou de putain de service pour assouvir les besoins des hommes, toujours seigneurs et maitres. Il critique également le rôle bien trop important de la famille ainsi que ce qu'il faut y sacrifier. Le tout est exposé par une Maria qui sait jouer de son corps pour rendre fou les hommes, mais se pose aussi des questions sur l'éducation qu'on donne aux jeunes hommes. Son personnage est un véritable catalyseur de tout ce qui dysfonctionne, mais met aussi en lumière ce qu'il y a de bon dans l'être humain. Plusieurs histoires semblent presque anecdotiques dans le récit mais renvoient, selon moi, à ce que Kamimura déteste de sa société.

Mais sa fin heureuse, en tout cas positive, invite à un nouvel espoir. Peut-être porté par les idéaux de la période (nous sommes juste après mai 68) il semble annoncer une jeunesse qui va vivre différemment. Et cet espoir final est très beau.



Inspiré de cinéastes, sans aucun doute, Kamimura fait de son histoire un pamphlet que je ne peux m'empêcher de trouver féministe, non pas en avance sur son temps mais intemporel. La place de Maria dans la société, sa vie et ses choix sont étonnants mais résonnent terriblement justes. Vouloir être autre chose que ce qu'on attend de nous ne sera pas sans heurts.

Je suis très volubile, mais la lecture de ce manga a été un petit choc. J'en suis ressorti sonné, avec un long moment de réflexion et de regard dans le vide. Je crois bien qu'il y a là quelque chose qui m'a touché. Quelle corde sensible ? Impossible de le dire immédiatement, mais cette lecture va résonner encore en moi. Je ne regrette ni l'achat ni la lecture de ce manga qui me semble incroyablement bon.
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