Terre Noire m'avait marquée, enfant, et ce dès la couverture aux touches art nouveau de la typographie sur une illustration qui plairait tant aux romantiques qu'aux réalistes — une transition qui se dessine et se raconte presque entre ces pages.



Natalia (ainsi que Stepan, même si c'est moins appuyé) m'a donné beaucoup de mal : j'ai trouvé difficile de m'attacher à ce personnage-type trop transparent qui met du temps avant de gagner en épaisseur et de quitter les clichés d'écriture des romans jeunesse. C'est précisément quand on voit son rôle dans une potentielle romance contrecarré qu'elle s'éloigne de sa fadeur — une transformation qui la rend d'autant plus intéressante.



Pensant à la moi enfant, je reconnais que Terre Noire introduit brillamment à la culture et littérature russes par du vocabulaire, des notions et des noms distillés goutte à goutte tout au cours du roman, son histoire en équilibre précaire sur les angles aigus de l'Histoire.



La présentation en correspondances, journaux et articles rend l'ensemble très vivant et laisse l'imagination s'égayer dans tous les recoins qu'ils laissent libres. De très beaux tableaux appuient ces libertés de lecteur, qui décrivent salons, opéras ou nature sauvage.



Je ne comprends pas comment l'épilogue a pu ne pas s'imprimer dans ma mémoire : il accuse les ressemblances avec ce qu'il y a de meilleur chez Dumas sans en avoir les longueurs, pique mon intérêt pour la suite, jusqu'au coup fatal porté par le rabat qui en fait la promotion. Si l'histoire a pris le temps de s'installer, j'ai embarqué, et me voilà prête à traquer les suites à ce premier tome.