Cet ouvrage est sorti lors des 5 ans du mouvement « MeToo ». Neuf voix féministes, représentant une certaine diversité de parcours, d'identités et donc de rapports au monde, se mêlent pour partager leurs réflexions sur ce que ce mouvement signifie et en faire un premier bilan. On y parle des espoirs, des avancées et des nombreuses limites qu'il invite à creuser.
A plusieurs endroits, les autrices rappellent l'origine de ce mouvement, à l'initiative de la travailleuse sociale noire et américaine Tarana Burke, et l'amplification mondiale qui a ensuite été observée lorsque l'actrice américaine Alyssa Milano a elle aussi lancé un mouvement portant le même nom, faisant suite aux enquêtes ouvertes contre Harvey Weinstein.
J'ai adoré lire la contribution d'Elvire Duvelle-Charles, qui raconte à quel point ce mouvement a permis aux victimes de se reconnaitre et de se sentir entourées, et de quelle manière il a montré les défaillances du système judiciaire concernant les violences sexistes et sexuelles. « Vous voulez que l'on arrête de faire appel au tribunal des réseaux sociaux ? Réparez le tribunal. Tant que la justice ne fonctionnera pas, on continuera à se faire justice avec les moyens du bord ».
J'ai aimé la réflexion intime d'Angèle qui se questionne sur la construction de son féminisme, et sur son rôle en tant que personnalité publique et populaire pour porter les convictions qui l'animent. J'ai aussi beaucoup aimé le décryptage de Rokhaya Diallo, toujours aussi juste dans ses propos, qui met en garde contre l'impression linéaire et très occidentalo-centrée que donne le mouvement MeToo au féminisme.
J'ai moins accroché avec la contribution de Camille Froidevaux Metterie qui parle beaucoup de l'intérêt du mouvement MeToo pour repenser des relations sexuelles épanouies, ce qui me semble un peu hors de propos et également très occidentalo-centré (pour moi lorsqu'on parle de violences sexuelles systémiques, avoir des rapports sexuels épanouis ne semble pas la revendication numéro une, il s'agit plutôt de repenser les relations et le rapport aux autres dans leur ensemble).
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Ce livre insiste sur la nécessité de penser un féminisme aux multiples facettes, qui ne peut pas se réfléchir en dehors des autres systèmes d'oppression, en particulier racistes, capitalistes, transphobes. Je n'avais pas vraiment suivi l'actualité concernant ce mouvement, en tous cas je n'en ai pas un grand souvenir, donc je suis contente d'avoir lu cet ouvrage collectif que je trouve très précieux pour les archives féministes.
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