Les Egyptiens représentaient les objets sous leur aspect le plus caractéristique, sous leur angle le plus reconnaissable.
Sous 'leur meilleur profil' en quelque sorte.
C'était lié à leur art funéraire. Dans le tombeau, l'artiste sculptait et peignait des éléments qui allaient accompagner le défunt dans son passage vers l'au-delà. Il fallait donc capturer les objets de la façon la plus 'complète' possible, et non les représenter sous un angle quelconque, qui aurait rendu leur identification incertaine.
Ce travail ressemblait plus à celui d'un cartographe qu'à celui d'un peintre.
Donc dire : 'Les Egyptiens dessinaient mal, on a fait des progrès car nous, on arrive vraiment à imiter la réalité' serait un peu à côté de la plaque.
'Représenter', ce n'est pas présenter une seconde fois la même chose.
(p. 122)
Ah, c'est pratique, l'humour ! Ça permet de dire une chose et de prétendre en penser une autre ! Et celui qui blague peut alors ne pas assumer la responsabilité de ce qu'il dit. [...] On fait porter toute la responsabilité du sens sur le récepteur. [...] L'humour c'est comme un coffre... à double-fond !
L'ironie, ou le second degré, c'est exactement ça. On joue sur le fait qu'il y a une ambiguïté sur le FOND du propos.
Mais dans un discours, on ne peut séparer fond et forme, apparence et contenu.
Car le destinataire reçoit tout ensemble. Fond et forme.
Quand on dit quelque chose, tout a du sens :
- ce qu'on dit
- comment on le dit
- à qui
- pourquoi
- et quand.
(p. 106-108)
Un terme a toujours une connotation et un dénotation.
La dénotation est le sens littéral. C'est la définition du mot qu'on trouve dans le dictionnaire.
Par exemple : TATOUAGE.
« Marque indélébile faite en introduisant des matières colorantes sous la peau au moyen d'une aiguille. »
La connotation, ce sont les sens indirects, implicites ; ce que le terme 'évoque'. Elle dépend du contexte :
- exotisme
- rébellion
- mode
- sexy.
Or, une représentation n'est jamais purement dénotative.
Les connotations sont moins fixes que les dénotations. Elles évoluent davantage, elles peuvent être transformées.
« Tatouage » en Occident :
- 1900 : marins, îles, exotisme
- 1950 : criminalité, prison, rebelles
- 2000 : sexy, art, branché
- 2050 : ?
Néanmoins, il y a quand même des codes dominants à un moment donné, car les classifications sont liées à un ordre social plus vaste, à un univers idéologique plus large.
(p. 126-127)
La philo, c'est presque comme voyager dans le temps ! Car les concepts ne se périment pas. Ils sont comme des outils, qu'on peut ressortir de leur boîte longtemps après.
Gilles Deleuze a dit :
« Une théorie, c'est exactement comme une boîte à outils. Il faut que ça serve, il faut que ça fonctionne. S'il n'y a pas des gens pour s'en servir, c'est qu'elle ne vaut rien, ou que le moment n'est pas venu. »
Sauf qu'un outil, on le fabrique pour un besoin précis, à une époque donnée. Le contexte peut changer, et le besoin, disparaître.
[...]
Mais ça, ce n'est pas grave. Regarde cette fourchette, par exemple. Je peux m'en servir pour autre chose que pour sa fonction initiale.
(p. 6-7)
« Critique » vient du grec « krinen », qui veut dire « séparer ». D’abord se séparer de soi-même, de ses propres représentations. C’est le principe de la réflexion. Comme un miroir, je réfléchis. C’est faire un retour sur soi. Ne pas rester rivé à soi-même. Prendre du recul. […] Séparer, c’est aussi faire des distinctions. Ça permet d’y voir plus clairement. De ne pas confondre des choses qui se ressemblent.
La philosophie est une nourriture sèche.