On commence tous quelque part. Si je n’arrive pas à courir, je peux toujours marcher. Petit à petit, j’y arriverai.
J’oublie notre passé, j’ignore notre futur, et dans ce présent, son corps abîmé et mon âme fatiguée ne font qu’un.
Pour moi, un beau corps c’est un corps qui s’autorise la vie. Ce n’est pas un corps qui cherche à se fondre dans un autre, qui envie celui du voisin, qui se force à être autrement. Un beau corps c’est un corps présent, pas un corps qui regrette le passé, pas un corps qui envie le futur. C’est un corps présent. Qui vit pour lui.
L’humain est idiot. Je suis idiot. La vie n’a aucun sens, du moins à mes yeux, et je ne saisis pas comment les gens peuvent vivre sans s’en rendre compte. Comment parviennent-ils à être heureux malgré le caractère vain de notre existence ?
Ils jouèrent ainsi, sans échanger aucune autre parole que celles que leurs mains se murmuraient, se découvrant avec douceur au travers de contacts à peine appuyés.
Parfois, j'ai l'impression d'être hors du monde. L'impression que... personne ne peut me comprendre. L'impression stupide que personne n'est passé par là. Alors que c'est faux. On sait tous que tout le monde a déjà eu notre âge ou l'aura un jour, mais... c'est comme si les autres oubliaient, tu vois ? Comme si le temps effaçait les souvenirs, forçait les gens à grandir, à oublier d'où ils viennent, et même parfois... où ils vont. Alors je suis là avec cette stupide... impression que les autres ne vivent pas ce que je vis, même ceux de mon âge. L'impression de porter une espèce de poids mort à l'intérieur. Parce que quand je regarde les autres, je les vois rire, s'amuser comme si le monde n'importait pas, comme si le temps ne s'écoulait pas. Mais moi ça me hante. Ça... ça m'effraie. J'ai peur de ne pas savoir où je vais. Ça me terrifie même.
C’est comme ça que j’ai découvert que si on voulait voir les étoiles, il ne suffisait pas d’éteindre les lumières et les écrans, il faut surtout attendre, se trouver là au bon moment, quand le ciel est dégagé. Et là, je les ai vues. Les étoiles…
Elle dévore la nourriture pour combler un vide créé par je ne sais quoi. Moi, c’est l’inverse. Je creuse un vide en moi pour tenter de retirer un trop-plein. Mais un trop-plein de quoi ?
Qui voudrait de moi ? Je suis une tige. Une paille. Une asperge. Un fil de fer. Les noms ne manquent pas. C’est de l’humour, disent les gens. L’humour est en train de me tuer.
Je ne sais pas quoi dire. La politesse voudrait que je murmure un merci, mais les compliments m'agressent presque autant que les insultes. Contrairement à ces dernières, je ne sais pas où les mettre. Les insultes se logent dans ma poitrine. Les compliments sont trop gros pour rentrer dans les poches de mon âme. Ou plutôt mon âme n'a pas de poche. C'est ça. Je devrais lui en coudre, mais jai peur qu'elles restent vides la plupart du temps.