Née en 1942, Suzanne Lardreau s'appelait Moralès. Elle avait été confiée à l'Assistance Publique, aujourd'hui DASS, après mauvais traitements par sa mère. Il apparaît dans les jugements que celle-ci affamait et délaissait sa fille, vendant les cartes d'alimentation qui lui était destinées. Les prétendants au poste de père se succédaient, mais Suzanne ne connaîtra jamais l'identité de son vrai géniteur, vraisemblablement germanique au vu de son physique.
Les tentatives de sa mère pour la récupérer furent vaines : déjà, Suzanne savait ce qu'elle ne voulait pas. Invisible aux yeux de la société, elle était chez elle à l'orphelinat. Une première tentative d'adoption s'était déjà soldée à 4 ans par un retour avec la mention : « orgueilleuse »...
Etait-ce là une tare ? Cet orgueil, c'était de l'amour-propre. Elle voulait vivre, étudier, grandir et non subir. Elle avait conscience de sa valeur et de ce qui pouvait ou non être accepté, que l'on fût de l'Assistance Publique, du peuple ou de l'aristocratie. La culture, le goût des livres et un oeil critique et amusé sur l'existence ont donné à la petite « orgueilleuse » les armes pour devenir une vraie grande personne.
Des études supérieures au lieu d'un poste de bonne chez les de Machin, une carrière à l'AFPA et une famille heureuse , Suzanne Lardreau a gagné brillamment. Son livre est à l'image de son caractère : sans concessions et plein de tendresse. Annie David