AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet

3.79/5 (sur 17 notes)

Nationalité : France
Né(e) : 1986
Biographie :

Adrien Lafille est un romancier français, né en banlieue parisienne. Il a obtenu un master de philosophie à l'université de Paris-Nanterre et anime régulièrement des ateliers d'écriture. Il publie régulièrement en revue (Cockpit, TXT, REVU, Un rectangle quelconque, ToCall, texte Ninja, etc.), et dirige la revue Confiture.

Ajouter des informations
Bibliographie de Adrien Lafille   (4)Voir plus

étiquettes
Videos et interviews (1) Voir plusAjouter une vidéo
Vidéo de
Adrien Lafille vous présente son ouvrage "La transparence" aux éditions Vanloo. Rentrée littéraire automne 2022. Retrouvez le livre : https://www.mollat.com/livres/2662679/adrien-lafille-la-transparence Note de musique : © mollat Sous-titres générés automatiquement en français par YouTube. Visitez le site : http://www.mollat.com/ Suivez la librairie mollat sur les réseaux sociaux : Instagram : https://instagram.com/librairie_mollat/ Facebook : https://www.facebook.com/Librairie.mollat?ref=ts Twitter : https://twitter.com/LibrairieMollat Linkedin : https://www.linkedin.com/in/votre-libraire-mollat/ Soundcloud: https://soundcloud.com/librairie-mollat Pinterest : https://www.pinterest.com/librairiemollat/ Vimeo : https://vimeo.com/mollat
+ Lire la suite

Citations et extraits (7) Ajouter une citation
Dans l'attente pure il y a des actions pures, elles arrivent et on ne peut rien y faire.
Commenter  J’apprécie          60
Violette est sortie un matin pour prendre des œufs dans le poulailler, elle est tombée sur une femme qui cherchait un endroit pour attendre et qui a demandé si elle pouvait le faire ici. Violette a dit d’accord parce qu’Antoine était parti depuis deux ans et qu’elle trouvait ça difficile d’attendre toute seule sans Antoine et sans Rotor. Cette femme s’appelait Lucie et elle a tout de suite demandé quelle sorte de poisson il y avait dans la rivière parce qu’elle ne savait pas qu’il n’y en avait pas. Violette a répondu qu’il fallait faire attention car il y avait un renard et que son chien Rotor était mort à cause de lui et qu’Antoine n’était plus là. Lucie a demandé qui est Antoine et Violette a répondu que c’est son amour et qu’il est parti. Lucie a dit que tout ça était triste et Violette a dit ça aussi.

Maintenant elles vivaient ensemble, ça s’est fait comme un éclair. Violette aimait bien Lucie mais elle lui a dit qu’elle n’avait qu’un seul lit. Lucie a répondu qu’elle pouvait dormir dedans avec elle alors Violette a dit qu’elle voulait bien mais elle a prévenu Lucie qu’il faudra penser à regarder l’heure parce qu’une fois ils n’ont pas pu sortir du lit avec Antoine à cause de l’obscurité. Lucie a répondu d’accord et Violette lui a demandé de ne plus jamais parler de ça et Lucie a encore répondu d’accord.

Lucie a dit qu’elle était venue ici pour attendre et Violette comprenait mais elle n’avait pas compris ce qu’elle voulait attendre et pour combien de temps. Elle lui a demandé mais cette question a mis Lucie en colère. Voilà le genre de choses qu’elle a crié à Violette : on ne doit pas cher- cher quoi attendre, il faut attendre et rien d’autre, tout le monde doit attendre. Alors Violette a dit qu’elle attendait aussi, qu’elle attendait les poissons. Et Lucie a encore crié qu’elle attendait quelque chose et que ça n’allait pas, parce qu’un poisson c’est quelque chose, et qu’elle n’avait rien compris si elle attendait les poissons. Violette supportait très bien qu’on lui crie voire qu’on lui hurle dessus, grâce à Lucie elle a compris ça : qu’elle allait retourner vers la rivière, elle n’y était pas allée depuis le départ d’Antoine parce qu’elle avait peur de se tromper sans lui, peur de penser qu’il y avait des poissons alors qu’il n’y en avait pas ou l’inverse. Comment on peut se tromper sur le sujet ? Impossible à dire.

Violette s’est dit que c’était ça qu’elle cherchait, attendre tout juste, elle appellera ça l’attente pure. Donc elle a décidé de retourner vers la rivière tout en se fichant des poissons. Elle l’a dit à Lucie et alors Lucie a tout de suite arrêté les cris, et elle s’est sentie mal de s’être emportée et ce genre de mal-être n’est pas facile à supporter. Elle s’en voulait d’avoir crié maintenant que Violette avait compris. Pourquoi Lucie avait crié sans attendre que Violette comprenne, elle qui attendait tant ? Elle n’a pas pu l’expliquer ni faire une simple hypothèse.

Elles étaient d’accord de toute façon, il s’agissait de viser l’attente pure et c’est ce qu’elles feraient ensemble.

Lucie a dit qu’elles verraient bien, qu’il arriverait peut-être quelque chose et elle a ajouté que si elles s’agitaient elles rateraient cette chose et qu’après ce serait foutu. Elles devaient être certaines qu’il s’était passé quelque chose ou qu’il ne s’était rien passé. Lucie a dit encore ceci à Violette : on peut attendre une chose inconnue, parce qu’il y aurait bien une chose à un moment donné et ce serait ridicule de penser le contraire, mais on ne doit pas essayer de prévoir cette chose, c’est interdit alors il faut respecter l’interdiction, c’était interdit et impossible. Attendre il s’agissait de le faire en étant sur ses gardes.
Commenter  J’apprécie          20
L’entrepôt est droit devant, couvert de métal gris, du métal d’entrepôt, c’est une vue métallique. De l’air se déplace, mais l’air n’a pas d’image. Et, en plein centre de l’entrepôt, une porte, elle aussi de métal, une porte impossible à ouvrir sans une clé, impossible à ouvrir sans appuyer sur une poignée, c’est une porte rouge qui brille, une porte dont le soleil montre tous les reflets rouges.
Minuit est passé depuis huit heures.
Une voiture approche, son bruit est d’abord plus petit que tous les bruits, puis il devient très grand, la voiture étant si proche, la voiture étant maintenant arrêtée devant la porte, une voiture bleu clair, plus clair que tous les ciels qui existent?
Le volant est tenu par deux mains qui sont la suite de deux bras, deux bras entourés d’un tissu blanc, puis d’un tissu gris, un gris qui n’a rien de métallique. Le volant est donc tenu par une personne, elle regarde loin devant la voiture, dans une ligne d’œil, horizontale comme aucune autre ligne.
La main droite de cet homme tourne la clé, comme des aiguilles de montre à l’envers, alors tout est stoppé sous le capot, les six cylindres ne font plus aucun mouvement, s’ils continuent à ne rien faire pendant assez longtemps ils atteindront une froideur de zéro degré Celsius. La main gauche de cet homme quitte le volant, elle trouve la poignée de la porte, elle l’ouvre et l’homme sort tout entier en plein dans l’air, il sent la dureté du sol, il le claque de ses deux semelles.
Il ouvre la porte rouge.
À l’intérieur, une voix dit : Sam, tu ne peux plus entrer, plus rien ne doit tourner sous ta clé, nous changerons toutes les serrures, pour que toi, Sam, tu ne puisses plus rien faire ici, pour que tu ne puisses plus venir.
Alors Sam, avec tant de force, jette sa clé à l’intérieur de l’entrepôt, vers la voix, et sort, il se tient dos à cette porte ouverte, et il dit quelque chose, très faiblement : tout le béton du monde sera cassé, les rayons du soleil brûleront le reste avec son feu.
Et Sam ne dit plus rien.
Commenter  J’apprécie          20
Elle lui a toujours fait signe de la main lorsqu’il sortait de la maison et ce matin rien. Ce qu’il avait compris c’était ça : pars et ne reviens jamais.

Chez eux c’est seulement chez elle maintenant, ce n’est pas loin d’une rivière on peut dire ça, on peut aussi dire qu’il n’y a jamais eu aucun poisson dans cette rivière. Un jour quelqu’un du village leur a demandé des détails à ce sujet alors ils ont répondu qu’ils attendaient les poissons et qu’ils ne pouvaient rien faire d’autre. Ils pensaient que chercher les poissons ailleurs c’était malhonnête, que ce ne seraient pas les bons poissons mais on ne sait pas bien pourquoi et c’est comme ça.

Il allait tous les matins vers la rivière pour deux raisons. Pour savoir si des poissons s’y trouvaient enfin, c’était la première raison. La deuxième : vérifier que le pont était toujours là, un petit pont en bois qu’il n’avait jamais traversé mais il valait mieux qu’il soit là parce qu’on ne savait jamais. Il avait toujours dit comme ça : heureusement qu’il y a un pont. Après il revenait vers la maison pour dire ce qu’il avait vu et c’était toujours la même chose, il n’y avait aucun poisson et le pont était encore là. Ça les rassurait de savoir ces choses-là mais ils se disaient aussi que le pont était en bois et qu’il allait s’effondrer un jour à cause de sa nature de pont en bois et voilà qu’ils n’étaient plus rassurés du tout.

C’est Antoine qui est parti ce matin, Violette est l’amour d’Antoine. Violette a toujours dit d’Antoine que c’est son amour. Il a toujours dit la même chose d’elle. Ils continueront à le dire malgré le départ parce que ça ne pouvait pas changer.

Maintenant il faut dire ceci : ils étaient tous les deux tristes ce matin parce que leur chien est mort hier. Ce chien c’était un grand lévrier et il s’appelait Rotor. Un renard a voulu manger une poule du poulailler d’Antoine et Violette il y a dix jours, Rotor a essayé de l’en empêcher mais aucun lévrier ne sait se battre on le sait très bien. Le renard a blessé Rotor à la patte avant gauche et la blessure s’est infectée alors Rotor a attendu de mourir et Antoine et Violette ont attendu aussi. Ils ont construit un radeau pour Rotor et puis ils l’ont déposé sur la rivière avec des fleurs mais la suite on ne savait pas. C’était un bon chien, voilà ce qu’on pouvait dire de Rotor. En tout cas Antoine avait compris ça : elle ne lui a jamais fait signe le matin, elle faisait signe à Rotor lorsqu’il allait vers la rivière avec lui et qu’elle les attendait près de la maison. En comprenant ça il ne pouvait que partir c’est certain.

Violette savait qu’elle était toute seule maintenant, elle le savait parce qu’il revenait toujours de la rivière à onze heures et il était déjà seize heures, il ne reviendrait pas.
Commenter  J’apprécie          10
Il reste madame Isa dans la cour.
L’homme lui dit d’aller dans sa classe, parce que le travail n’est pas fini, parce qu’il y a des choses à faire savoir, des chiffres à faire multiplier, il dit que les chiffres sont partout.
Madame Isa n’entend rien du tout, elle marche dans la direction inverse, elle va jusqu’au portail, elle l’ouvre et sort de la cour, l’homme pousse un cri très fort, elle sent l’air se tordre mais elle fuit cette déformation, elle avance dans la rue de la campagne.
Elle porte une jupe rouge avec un pull noir, avec un manteau noir, ses cheveux sont blonds, toute la lumière qui les touche rebondit à la vitesse la plus grande du monde.
Une minute après la sortie de l’école, madame Isa croise Anne, tout le monde la connaît, elle marche des journées entières, elle connaît tous les visages. Et celui de madame Isa, aujourd’hui elle voit bien qu’il n’est pas le même, c’est bien son visage mais c’est un peu un autre, il est lisse, si lisse qu’elle ne peut rien y comprendre.
Alors Anne lui demande : qu’est-ce qui s’est passé pour que
C’est la première fois qu’Anne ne termine pas une phrase, la ville entière sait qu’elle termine toujours ses phrases, elle sait prononcer le point de chaque phrase comme personne d’autre ne sait le faire. Anne sent une chanson sur le milieu de sa langue, une chanson qu’elle peut encore chanter, ce sera peut-être le dernier son qui sortira de sa bouche, la voix d’Anne disparaîtra peut-être juste après, pour aujourd’hui seulement ou pour toujours.
Elle approche ses lèvres de l’oreille de madame Isa, elle ne chante pas fort du tout, mais elle chante : tu es si loin de moi – je ne sais pas où est mon amour – je suis si loin de toi.
Madame Isa se tourne vers Anne, elle la regarde dans les yeux, elle essaye de faire un signe, de changer la forme de ses joues et de déplacer ses lèvres, mais elle ne peut pas. Elles attendent toutes les deux mais rien ne se passe, il ne reste plus que les paroles de la chanson.
Madame Isa, comme Anne, connaît toute la ville.
Commenter  J’apprécie          10
Il faut encore une fois tourner à gauche, c’est l’avenue de la forêt qui est la plus grande de la ville, personne ne va à pied d’un bout à l’autre, personne sauf madame Isa, elle le sait, elle a attendu longtemps certains jours et ce qu’elle a vu est clair, personne ne marche d’un bout à l’autre de cette avenue
Elle sait exactement pourquoi, c’est que tout le monde a peur de traverser une forêt, tout le monde a peur de ce qui peut arriver pendant la traversée, même si c’est la plus invisible des forêts.
Elle a traversé cette avenue des milliers de fois, elle vit dans cette ville depuis quarante-six ans, depuis sa naissance, une vie entière ici, dans la ville dont elle ne dira plus jamais le nom, elle ne le prononce plus depuis déjà trente-six ans, depuis sa première traversée. Elle avait dix ans, elle a eu peur, elle a toujours peur, mais elle la traverse encore. Ce jour-là une voiture s’est arrêtée, le conducteur a dit une phrase qu’elle a tout de suite oubliée, elle a continué à marcher, la voiture l’a suivie tout doucement. Mais elle avait un couteau dans sa poche, elle avait prévu, elle l’avait pris dans la cuisine avant sa traversée, elle l’a montré au conducteur, la voiture n’a plus été lente, elle a accéléré, madame Isa n’a plus revu cette voiture, elle n’a plus revu le conducteur.
À dix ans elle n’avait pas le même nom, mais personne ne voudrait en savoir plus.
À chaque fois qu’elle prend cette avenue elle a ce couteau, il se plie, le manche est en bois, il tient très bien dans sa main, il est très pointu, très coupant, il est dans son sac.
Depuis trente-six ans aucune voiture ne s’est arrêtée à côté d’elle.
Commenter  J’apprécie          10
C’est le bord de la ville et l’horizon est plat, c’est une plaine, les herbes craquent de froid sous les pieds de Dan, ses doigts sont bleus, il vient du sud et de sa bouche sort un nuage. L’après-midi est presque terminée, une lumière sans aucune chaleur éclaire la gauche de son visage.
Marie est assise dos à sa maison, ses bras sont croisés, elle voit Dan, il est encore si loin, il s’approche en traversant l’air.
Une troisième personne est là.
Kazimir est aussi éclairé par le froid du soleil, il vient du nord, il fait craquer le givre, et ses oreilles sont rouges. Dan s’arrête devant lui, il lève les mains pour montrer ses doigts, Kazimir n’a jamais vu des doigts si bleus, alors il se pince les lèvres avec les dents, il montre ses propres oreilles qui sont très rouges, il les pointe avec ses index.
Les doigts les plus bleus, en face des oreilles les plus rouges.
Et puis tous les deux se tournent vers Marie, ils marchent dans sa direction, ils passent tout près d’elle, et juste avant de continuer leur chemin, vers leur immeuble, juste avant de disparaître, ils lui disent que tout se brise sur le sol, que tout ce qui craque est transformé en rayons, ils disent qu’il faut des yeux pour les voir.
Commenter  J’apprécie          10

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Adrien Lafille (15)Voir plus

Quiz Voir plus

Les trois mousquetaires

De quelle couleur est le cheval de d'Artagnan ?

Rouge
Bleu
Noir
Jaune

16 questions
1034 lecteurs ont répondu
Thème : Les Trois Mousquetaires de Alexandre DumasCréer un quiz sur cet auteur
¤¤

{* *}