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Citation de Alice_


C’est aussi au détour d’une histoire d’arbre que j’en suis venue à traduire Cynthia Ozick. Cela faisait une quinzaine d’années que j’admirais cet auteur, qui est pour moi l’un des plus grands écrivains vivants. Je la lisais en français, car j’aime les traductions, et je rêvais d’avoir un jour le privilège de m’essayer à transposer sa prose ample et exigeante. Un monde vacillant était sur le point de paraître aux Éditions de l’Olivier et la personne qui s’occupait de relire les épreuves m’a demandé un conseil « plus de jardinière que de traductrice, a-t-elle précisé. A la fin du roman, un arbre fleurit, or il se trouve que c’est un lilas et qu’on est en automne. Tu ne connaîtrais pas un arbre susceptible de fleurir à la fin de l’été pour qu’on puisse le remplacer ? » Ce n’est pas la jardinière qui a répondu, mais la traductrice : « Si le lilas fleurit à l’automne en anglais, il doit pouvoir fleurir à l’automne en français. Le traducteur n’est pas là pour corriger les négligences, les oublis, les erreurs. » Cette conception n’est pas, loin s’en faut, partagée par l’ensemble de mon corps de métier. Pour nombre de mes confrères, notre tâche irait jusqu’au fact checking, la vérification des faits chères aux agences de presse. Mais la vérité littéraire est selon moi sans rapport avec la vérité telle que la conçoivent les professionnels de l’information. Les romans ne prétendent pas enseigner quoi que ce soit. Parfois un mot vient se glisser dans la phrase en dépit du référent qu’il désigne, à cause d’une sonorité, d’un nombre de syllabes, d’une association d’idées. C’est pourquoi l’oreille du traducteur se doit d’être fine et sa souplesse extrême. Il n’est pas là pour juger, il est là pour comprendre.
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