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Citation de sosotess


Ben m'explique très simplement, sans que j'aie besoin de l'interroger davantage, sans me faire porter la responsabilité de l'enquête, qu'il n'a pas de vie amoureuse.
- Mais sexuelle, oui?, je demande, un espoir niais dans la voix.
-Non, répond-il sans tristesse et sans joie.
-Comme un curé, alors? Comme une nonne?
-Pas vraiment, dit-il après un temps. Pour moi, ce n'est pas une contrainte, ni une obligation. Ce n'est pas un sacrifice.
Il hésite un temps.
-Ce n'est pas par manque de goût, non plus, ajoute-t-il. C'est ainsi.
-Comme une malformation, alors?
J'ai beaucoup trop bu. Je dis n'importe quoi. Grossière et agressive. Mais il éclate de rire. Il est hilare, plié en deux. La délicatesse de Ben, me dis-je, est une forme de magie. Il se calme et, pédagogue, reprend son exposé.
-Je suis normal. Il n'y a pas de sexe dans ma vie, comme chez certains, il n'y a pas de littérature, ni de musique. Ces gens vivent aussi, comme nous. Ils apprécient d'autres choses, ont d'autres plaisirs. Il ne leur manque rien, puisque cette chose, pour eux, n'existe pas.
Un soulagement violent, comme après un effort interrompu sur un tempo inhumain, me dessoude et je pense : ne pas désirer, dans ce monde si contraire et si hostile, voilà la vraie liberté. Finies les attentes, finies les trahisons, les coeurs souillés, les corps coupables. Terminé le tourment et les heures gâchées dans la fabrication de pitoyables stratégies. [...]
-Mais cela, reprend Ben, [...], ne veut pas dire que je ne sache pas aimer, aimer d'un autre genre d'amour."

"-Tu ne vas pas rester toujours comme ça, lui dis-je. Ca va changer.
[...]
-Non, je ne crois pas. Je ne vais pas changer. Et je ne veux pas changer. Je ne suis pas seul. Il y en a d'autres comme moi. Plein de jeunes. Il y en a toujours eu, sauf qu'avant ça se voyait moins. Avant on n'en parlait pas, mais parce que avant, on ne parlait de rien. La proportion de puceaux sur une population adulte est constante. A quoi vous l'attribuez, vous? A la timidité? Alors c'est vrai, sur la quantité, il y a les infirmes, les fous, les malades, et puis il y a nous.
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