D’un seul jet, tout à trac, il jeta sa défense en pâture aux jurés et aux journalistes. Ce fut un travail prodigieux. Les yeux lavaliens, inoubliables, mesurèrent la salle, le public, les juges, avec angoisse d’abord, avec assurance bientôt, avec une familiarité bonhomme pour finir. Tout à tour pathétique, drôle, émouvant, finaud, s’aidant de la voix qui n’était pas sans beauté, s’aidant de ses mains merveilleuses pour affirmer, réfuter, blâmer, convaincre, Laval, témoin d’un jour, réussissait à l’issue de l’audience une entreprise de séduction, qui devait lui fausser son optique d’accusé et contribuer à le perdre quelques semaines plus tard.
(Laval, témoignant au procès de Pétain. Eté 1945)